Note 4.1 : L’entrepreneur : stratège, pilote et visionnaire
Note 4.2 : Un exercice de conviction nourri
Note 4.3 : Le porteur du projet : une composante à part entière du Business Model
Note 4.4 : Créer et/ou diriger, le contrôle de l’entreprise naissante
Note 4.5 : Profil de l’entrepreneur : traits, motivations,..
Note 4.6 : Les motivations se combinent
Note 4.7 : Information, sensibilisation, formation et accompagnement à l’entrepreneuriat
Note 4.8 : L’expérience entrepreneuriale
Note 4.9 : Les compétences entrepreneuriales
Note 4.10 : Des entrepreneurs dans l’entourage
Note 4.11 : J’ai décidé d’être entrepreneur parce que c’est bon pour la santé
Note 4.12 : Bilan de compétences entrepreneuriales
Note 4.13 : La motivation du dirigeant
Note 4.14 : Les questions intimes..
Note 4.15 : Équipe entrepreneuriale
Note 4.16 : Interviews
Souvent, les investisseurs affirment que si le projet entrepreneurial est important, celui qui le porte, qu’il s’agisse d’un individu ou d’une équipe, l’est bien davantage. Un bon pilote saura faire émerger une représentation du business partagée par les parties prenantes et conduire l’organisation vers le futur désiré 4.1.
Autrement dit, il ne s’agit pas uniquement de savoir raisonner ou de considérer la réflexion comme un exercice isolé alors qu’elle se nourrit des interactions avec les partenaires potentiels. L’entrepreneur conçoit un modèle dans lequel il met de l’énergie, de la stratégie et beaucoup de conviction. En effet, s’il y a bien un exercice que déploie sans cesse l’entrepreneur, c’est l’exercice de conviction (convaincre les clients d’acheter, les salariés de travailler, les fournisseurs de livrer, les « financeurs » de financer, etc.) 4.2. Bref, il s’agit, d’une part, de convaincre les possesseurs de ressources de les apporter durablement et, d’autre part, de satisfaire tout aussi durablement des parties prenantes aux attentes multiples par la mise en place de relations de type gagnant-gagnant.
Avant d’apporter les ressources singulières convoitées par l’entrepreneur, les partenaires doivent croire en sa capacité à réunir les différentes ressources nécessaires à la préparation, au lancement, voire à la pérennité de l’affaire. Si l’entrepreneur est la première des parties prenantes à considérer, il possède un statut tout-à-fait particulier justifiant qu’il soit identifié comme une composante à part entière. Il est une pièce maitresse du Business Model. C’est lui qui tient le premier rôle 4.3.
Les partenaires ne s’y trompent pas et tentent de savoir à qui ils ont à faire. S’ils ne sont pas convaincus par le porteur, ils peuvent soit ne pas s’engager, soit proposer de soutenir le projet à condition qu’un manager soit recruté 4.4. Le porteur du projet comprend alors que créer une entreprise est une chose, la diriger en est une autre… Si le recrutement d’un manager pour diriger l’entreprise est parfois la bonne solution pour tout le monde, dans tous les cas le porteur d’un projet gagne à procéder à un exercice d’introspection. En effet, on se vend mieux quand on se connaît bien. Sincérité et lucidité sont ici les mots clés, et s’il y a quelques faiblesses, c’est humain… personne n’est à l’image exacte de ce que l’autre aimerait.
A cette fin, voici quelques aspects à explorer.
Le profil.
Si vous avez le sentiment de posséder des qualités psychologiques ou comportementales appréciées chez un entrepreneur, racontez-les. Il n’y a pas de profil type de l’entrepreneur, mais certaines caractéristiques peuvent montrer votre capacité à créer une entreprise, voire à la diriger 4.5.
Les motivations.
L’entrepreneur est souvent porté par un ensemble de motivations 4.6.
Avez-vous cerné les vôtres ? Sont-elles de nature à vous « booster » ? Dans le cas d’une équipe entrepreneuriale, les motivations des membres sont-elles compatibles ?
Avez-vous suivi une formation plus ou moins longue, à l’entrepreneuriat ? 4.7.Une réponse positive à cette question témoigne d’une détermination à vouloir bien faire.
L’expérience et le parcours antérieur.
Ils intéressent beaucoup le partenaire, notamment lorsqu’ils concernent une histoire dans le secteur d’activité, des relations avec des clients concernés par l’offre ou plus largement avec des parties prenantes potentielles 4.8.
Il est également tout à fait possible de s’appuyer sur les éléments du Curriculum Vitae, sans oublier, d’une part, les diplômes obtenus lorsqu’ils révèlent une compétence attendue 4.9 et, d’autre part, les autres projets auxquels vous avez participé. Ces derniers ne concernent pas forcément du business mais ils traduisent l’énergie que vous avez su déployer pour leur réalisation.
L’entourage familial, amical et les relations professionnelles.
Ils permettent d’identifier vos soutiens.
Votre réseau personnel est aussi vu comme un apport possible de conseils, d’aides et d’accès à un réseau plus vaste 4.10.
Si vous êtes accompagné par une structure de conseil et d’accompagnement à l’entrepreneuriat, il est important de le signaler.
Tous les aspects à travailler ne seront pas ici épuisés 4.11. Pour aller plus loin, la réalisation d’un bilan de compétences 4.12, ainsi qu’un travail avec un coach en matière de motivation entrepreneuriale 4.13, sont une excellente façon de donner du sens à la trajectoire à la fois personnelle et professionnelle envisagée. L’engagement dans l’entrepreneuriat combine en effet les deux. C’est pour cette raison que, parfois, les questions posées par les partenaires peuvent sembler plus intimes 4.14. A leurs yeux, le porteur incarne le projet, il le porte avec son histoire, ses valeurs, sa formation, son réseau, ses schémas cognitifs, etc.
Enfin, et comme c’est de plus en plus souvent le cas, les projets entrepreneuriaux sont portés par une équipe dont chaque membre procèdera à l’introspection ici proposée 4.15. Il s’agira alors, en complément de l’histoire ayant réuni ces membres, de montrer qu’il s’agit d’une équipe gagnante ! 4.16
Accéder à l’animation vidéo de ce texte.
Les spécialistes de la stratégie citent souvent le philosophe Sénèque. Dans une des lettres tirées de sa correspondance avec l’un de ses disciples, Lucilius, il dit à peu près ceci : « il n’y a pas de vent favorable pour celui qui ne sait où il veut aller ». Autrement dit, il convient de savoir là où on veut aller pour mieux identifier le chemin pouvant y conduire et, ainsi, atteindre le futur désiré (il est ici possible d’évoquer une analogie avec la carte routière ou, désormais, avec les applications GPS se chargeant de calculer les chemins, mais qui ont toujours besoin de connaître la destination pour proposer des itinéraires).
Même si le parcours sera probablement jalonné d’imprévus et de difficultés non totalement anticipées, encore faut-il, sans certitude mais avec volonté, que l’entrepreneur formule des souhaits ou des conceptions de l’avenir à propos des affaires imaginées. En ce sens, un entrepreneur est un visionnaire. Cette caractéristique ne fait pas de lui un être divin, mais un individu volontaire. « En raison des multiples recherches sur la vision stratégique, il est difficile d’en proposer une conception univoque. Une façon de dépasser cette difficulté consiste à s’interroger sur l’utilisation du terme « vision » lui-même. Il peut revêtir une consonance à l’occasion métaphysique, érigeant la « clairvoyance » de certains entrepreneurs en une faculté échappant à toute forme de rationalité. L’entrepreneur serait la Madame Irma du business dont la boule de cristal fournirait les visions exploitables. Même en reconnaissant à l’entrepreneur certaines dispositions, il vaut mieux oublier cette piste … » (Verstraete, 2010, p.169).
Cette volonté stratégique incite l’entrepreneur à se donner les moyens de ses ambitions, c’est-à-dire réunir les ressources et les agencer pour réaliser sa vision (l’étude des projets d’entreprendre montre également que les entrepreneurs font également souvent avec les moyens du bord). L’entrepreneur tente alors de rendre l’environnement congruent à la représentation qu’il s’en fait par des actions plus ou moins, à la fois, planifiées et contrôlées pour matérialiser sa vision. Lors d’une création d’entreprise, la planification consiste à faire un effort de placer des échéances donnant lieu à une évaluation pour apprécier l’atteinte des objectifs. Quant au contrôle, il est trop souvent mal compris ou mal adapté de systèmes convenant plutôt aux entreprises établies, d’ailleurs souvent grandes. Ce point sera abordé lors du chapitre sur la composante «Performances»). Ces actions de l’acte entrepreneurial rejoignent la stratégie dans deux engagements concernant, d’une part, le choix d’une position de l’organisation (et de ses produits et/ou services) dans un avenir plus ou moins lointain et, d’autre part, le mise en place d’une organisation pour y parvenir (Filion, 1991 ; Verstraete, 2001, 2003). Il n’est pas rare que la dynamique correspondante réponde à une conception guerrière de la stratégie. Cette dernière est fidèle à l’origine du terme et propose de conquérir le territoire de l’autre (ici, celui du concurrent). Le verbe grec «stratego » concerne la conduite des armées et l’utilisation efficace des ressources pour détruire l’ennemi (Desreumaux, 1993).
La stratégie consiste alors à décider d’une position à occuper sur le terrain et à mobiliser des ressources organisées efficacement pour prendre cette position (une telle application à l’entreprise est discutée, voir par exemple la façon dont y procède Fréry en 2015 lien). Positionnement et configuration organisationnelle lient la pensée stratégique et l’action entrepreneuriale (Verstraete, 2001, 2003). Elles conduisent également au débat entre stratégie et structure (cf. Chandler, 1962) et à se demander si le choix de positionnement précède l’organisation des ressources réunies pour réaliser la vision. La réalité montre parfois l’inverse, les moyens réunis conduisant parfois à davantage de modestie, ou à l’inverse à plus de prétention, quant à l’avenir possible. En règle générale, l’entrepreneur jonglera entre ses ambitions et les ressources réunies pour décider où aller et mettre en œuvre l’organisation pour y parvenir. Il gagne à être à la fois stratège, pilote et visionnaire (ce point renvoie à la note sur le profil de l’entrepreneur 4.5).
A vous de jouer :
1/ Retrouver la phrase de Lucilius dans un des ouvrages dédiés à sa correspondance avec son disciple.
2/ Illustrer l’adage « avoir les moyens de ses ambitions ».
3/ Illustrer l’adage « faire avec les moyens du bord ».
4/ Livrer une illustration où 2/ et 3/ se combinent.
Pour aller plus loin :
Fréry, F. (2015), « Stratégie d’entreprise et stratégie militaire », vidéo, Xerfi Canal TV lien
Filion, L.-J. (1991), Visions et relations : clés du succès de l’entrepreneur, Les éditions de l’entrepreneur, MontréalVerstraete, T. (1999), Entrepreneuriat – connaître l’entrepreneur, comprendre ses actes, L’Harmattan
Verstraete, T. (2003). Proposition d’un cadre théorique pour la recherche en entrepreneuriat, Editions de l’ADREG, décembre, ici en langue française ici en langue anglaise
Verstraete, T. (2010). Préparer le lancement de son affaire – Méthode à l’usage de l’entrepreneur et de son conseiller, de Boeck
Le recours au BM peut se justifier par le souhait de gagner en conviction auprès des possesseurs de ressources (pour les transformer en parties prenantes). Mais il ne faudrait pas oublier trois points majeurs indissociables d’un tel gain. La maturation du projet, la rencontre des partenaires et la capacité de l’entrepreneur à traduire le business nourrissent l’exercice de conviction.
1/ Maturation du projet : la pertinence du contenu des composantes du BM et de leurs liens. La mise au point de chaque composante du BM peut utilement convoquer des outils (stratégiques, marketing, techniques de créativité, etc.) pour préciser son contenu. Lorsque l’entrepreneur ne possède pas toutes les compétences ou le temps pour déployer personnellement les outils permettant de concevoir les composantes et les liens entre celles-ci (on ne peut pas demander à chaque entrepreneur d’être un expert-comptable, ou un expert en marketing, en propriété industrielle, en prototypage, …), son conseiller l’aidera dans le choix d’un sous-traitant compétent. L’entrepreneur gagnera parfois à suivre un apprentissage pour, a minima, comprendre les résultats produits (ex : ceux d’une étude de marché). Cette précaution évitera les mobilisations et interprétations anecdotiques des outils (ex : les mobilisations bâclées du modèle SWOT, irrespectueuses de ses soubassements, sont nombreuses).
2/ Les partenaires rencontrés pour la mise au point des affaires. L’entrepreneur construit, chemin faisant, une représentation d’autant plus facile à faire partager qu’elle tient compte des attentes des partenaires, qu’il faut donc rencontrer. Parfois, un premier rendez-vous ne permet pas d’aboutir à l’échange attendu. Les primo-entrepreneurs apprendront alors que la négociation consiste, sans évidemment céder à tout, à entendre, à comprendre puis, expérience aidant, parfois à anticiper les attentes des possesseurs de ressources pour revenir vers eux avec une relation gagnant-gagnant mieux cernée.
3/ La capacité du porteur du projet à rendre accessible le BM aux nouveaux partenaires qu’il souhaite enrôler. Pour être convaincant, il faut que l’entrepreneur soit déjà convaincu lui-même. A défaut, ses interlocuteurs percevront sans doute un manque de conviction. L’autre étape consiste à savoir raconter le BM de façon convaincante. Cet exercice s’effectue à l’écrit et à l’oral. S’agissant de l’écrit, GRP Lab propose d’utiliser le logiciel GRP Storyteller, il permet de raconter le Business Model en 9 phrases (mode Poster), en 9 paragraphes (mode Storyboard) ou en 9 pages (mode Script). Ce logiciel est présenté ici. S’agissant de l’oral, l’exercice porte le nom de Pitch. Il se réalise en quelques minutes.
Une prochaine note le présentera plus en détail.
Ainsi vu, l’exercice de conviction nécessite de s’appuyer sur un BM au contenu pertinent grâce aux outils mobilisés à cet effet, aux partenaires enrichissant la représentation partagée par le collectif réuni autour du projet d’entreprendre et à la capacité de l’entrepreneur à raconter le business envisagé.
A vous de jouer :
1/ Est-il pertinent de mobiliser le modèle stratégique SWOT dans un contexte à forte vélocité ?
2/ Donner un exemple d’utilisation pertinente, puis un autre d’utilisation anecdotique (donc à éviter) d’un outil aidant la mise au point du projet d’entreprendre.
Le porteur du projet peut être vu comme une partie prenante. Il pourrait alors prendre place dans le chapitre 10, c’est-à-dire dans la composante correspondante. GRP Lab le considère pourtant comme une composante à part entière pour plusieurs raisons dépassant l’intérêt théorique dont l’entrepreneur a fait l’objet (on pensera par exemple aux écrits de Richard Cantillon, Jacques Turgot, Adam Smith, Jean-Baptiste Say, Alfred Marshall, Werner Sombart, Joseph Schumpeter, Franck Knight, George Gilder, Peter Drucker,…). Cet intérêt suffirait certes à justifier notre choix.
Plus prosaïquement, il faut entendre un investisseur insister sur l’importance du porteur du projet ou de l’équipe portant le projet d’entreprendre pour comprendre que leur statut est tout à fait particulier. Cette seule composante peut le conduire à refuser de s’engager, ou parfois à n’accorder le financement que sous réserve du recrutement d’un manager pour diriger l’entreprise (recrutement auquel il pourra participer) 4.4. Ce cas traduit son doute sur la capacité du porteur à diriger l’affaire.
Il faut aussi relever que le porteur du projet est l’acteur ayant la représentation la plus complète de l’affaire en construction. Son histoire et ses expériences, ses motivations, son entourage, etc. jouent un rôle clé dans ses apprentissages, sa réflexivité, sa vision, lesquels modèlent la représentation du business. Parce qu’il porte le projet, l’entrepreneur a un statut exceptionnel le distinguant des autres parties prenantes.
Sans épuiser ici les arguments pratiques justifiant le statut de l’entrepreneur comme composante du BM, tous les territoires souhaitant se dynamiser connaissent le rôle de cet acteur dans l’impulsion du phénomène.
Enfin, on invitera à la visualisation de l’interview du Professeur Olivier Torrès, notamment pour comprendre à quel point le dirigeant d’une PME est un acteur singulier lien.
Pour aller plus loin :
Boutillier, S. Uzunidis, D. (1995). L’entrepreneur – une analyse socio-économique, Economica
Boutillier, S., Uzunidis, D. (1999). La légende de l’entrepreneur – le capital social ou comment vient l’esprit d’entreprise, Syros
Fau, J. (1997). Les entrepreneur – propriétaires ou gestionnaires ?, Editions Cujas
Créer une entreprise est une chose, la diriger en est une autre … Le créateur d’une entreprise doit comprendre ce point parce qu’il peut, lui-même, avoir tout intérêt à ce que l’organisation soit dirigée par un autre. Le propos suivant reprend les éléments de l’introduction d’un article publié dans la Revue du Financier.
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« S’agissant, à la fois, du financement et du contrôle de l’entreprise naissante, les faits montrent un questionnement à l’apparence triviale mais pourtant crucial pour le porteur d’un projet : comment ne pas être évincé de l’organisation qu’il crée alors que, parfois, le projet appelle des capitaux qu’il est loin de pouvoir détenir seul ? Cette question pratique peut être éclairée par le corpus théorique de la gouvernance d’entreprise. Plus particulièrement, mais pas seulement, la partie relative à l’enracinement du dirigeant est à considérer puisqu’un créateur peut demander à celui qui l’accompagne dans le montage de son projet: « Comment puis-je m’enraciner dans l’entreprise que je crée, alors que je ne peux pas en avoir le contrôle financier ? ». Certes, la formulation pratique est différente, mais fondamentalement la question de la gouvernance de l’entreprise naissante est posée et force est de constater un manque de recherche théorique dans ce domaine. Traditionnellement, la gouvernance (corporate governance en anglais) s’intéresse aux liens entre différentes parties prenantes de l’entreprise, et particulièrement aux relations d’un conseil d’administration avec un dirigeant, ce dernier occupant une position charnière dans une prise de décision stratégique visant, avant tout, la création de valeur pour l’actionnaire (Caby, Hirigoyen, 2005).
La gouvernance de l’entreprise, tant par la presse que par les recherches académiques, concerne ainsi le plus souvent la firme managériale [une entreprise, plutôt grande, dirigée par un manager recruté par le conseil d’administration]. Parmi les problèmes qu’elle pose, par exemple, le Conseil d’Administration s’interroge sur le pouvoir pouvant être laissé à un manager recruté pour diriger la firme. Les administrateurs sont intéressés par la préservation de la rente que leur octroie l’entreprise et/ou la maximisation de leur profit ou de leur patrimoine.
Avec le corporate social performance, une vision plus sociale conduit à tenir compte de l’ensemble des parties prenantes (ou stakeholders) de la firme et envers lesquelles celle-ci a des responsabilités. La gouvernance est alors conçue de façon plurale et, selon la formulation de Caby et Hirigoyen (2005), au primat des shareholders [les actionnaires] succède celui des stakeholders.
La performance ne peut s’expliquer sur le long terme que par une satisfaction de cet ensemble. Dès lors, la valeur ne peut être considérée comme univoque et se relativise à chaque catégorie de stakeholders. La mesure de la valeur s’effectue de façon partenariale (Charreaux, Wirtz, 2006).
Si cette conception de la gouvernance semble moins considérée dans les pratiques effectives des firmes managériales concernées par les marchés financiers (même si les rapports d’activité communiquent de plus en plus en direction de tous les stakeholders), elle est cruciale dans le cadre de l’entreprise naissante. En effet, petite au départ, la firme se structure à partir des ressources réunies par la sollicitation des possesseurs de ces ressources qu’il faut transformer en stakeholders. Ensuite, le développement de l’entreprise dépend pour une large part des politiques fonctionnelles mises en œuvre afin d’optimiser l’échange de valeur avec chaque catégorie de parties prenantes (politique d’achat pour optimiser les relations d’échange avec les fournisseurs, politique salariale pour les salariés, etc. ; voir Verstraete, 2003). Ces politiques fonctionnelles sont ainsi la garantie pour maintenir la satisfaction des attentes des parties prenantes, sans oublier bien évidemment ce qu’en tire l’entreprise (voir le numéro spécial de Long Range planning, volume 31 n°2). Pour autant, les fondateurs sont très préoccupés par le montage juridico-financier de leur affaire et le contrôle qu’ils auront de l’entité créée par la maîtrise du capital social financier. L’ambition du projet entrepreneurial en est parfois réduite pour assurer au créateur cette maîtrise, au risque de sous-dimensionner (par sous-capitalisation) ce projet par rapport à une lutte concurrentielle appelant en fait un financement bien supérieur. On pensera, par exemple, aux services innovants sur Internet où la prime au premier entrant ne peut pas être effective pour un projet trop modeste. Prenant conscience de l’importance de financer le projet de façon optimale, les porteurs interrogent alors leurs conseillers pour recevoir la solution leur garantissant la maîtrise du projet, ce qui n’est, malheureusement pour eux, pas toujours possible. À côté de cette démarche inscrite dans l’expérience juridico-financière des praticiens, force est de constater un manque de travaux académiques circonscrits au problème ici exposé et dont la question centrale est la suivante : comment un créateur peut-il garder le contrôle tout en ayant accès aux ressources nécessaires à la création de son projet?»
Barrédy, Boucher, Verstraete, 2008
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Si on reste quelque peu démuni pour apporter une réponse générique à cette question, à défaut d’un contrôle par le capital financier (seul ou avec la collaboration d’actionnaires fiables acquis à la cause du créateur), la première façon pour l’entrepreneur de rester capitaine à bord d’un navire qui n’est pas que le sien tient en trois points: compétences, connaissances, réseau (Barrédy et al., 2008).
Mais plus crucialement, il ne craindra pas l’arrivée d’un manager, parfois exigé par un capital-risqueur, pour y voir plutôt une opportunité de délégation de la mise en place de systèmes de gestion. Pour chaque stade de la vie de l’entreprise (ex : conception, lancement, croissance), certains de ses financeurs pourront souhaiter voir apparaître dans l’organigramme un acteur ayant les compétences attendues. Kaplan et Strömberg (2001, 2003a, 2003b) estiment que les capitaux-risqueurs s’engagent, dans 50% des cas, dans la conduite de l’entreprise et, pour 14 % de ces cas, participent au recrutement des managers.
S’agissant des investisseurs en capital, on lira avec intérêt Rédis (2009).
Pour aller plus loin :
Barrédy, C. Boucher, T. Verstraete, T. (2008). « Le contrôle de l’entreprise naissante par son créateur : un regard par les théories de la gouvernance d’entreprise », Revue du Financier, 170
Caby, J., Hirigoyen, G. (2005). Création de valeur et gouvernance de l’entreprise. Paris : Economica,
Charreaux, G. Wirtz, P. (2006). Gouvernance des entreprises – nouvelles perspectives, Economica, 2006.
Kaplan, S. Strömberg, P. (2001). « Venture capitalists as principals: contracting, screeening, and monitoring », American Economic Review, 91(2)
Kaplan, S. Strömberg, P. (2003). « Financial Contracting Theory Meets the Real World : An Empirical Analysis of Venture Capital Contracts. », Review of Economics Studies, 70(2)
Kaplan, S., Strömberg, P. (2003). « Venture Capitalists As Economic Principals », NBER Reporter
Rédis, J. (2009). Finance Entrepreneuriale – le créateur d’entreprise et les investisseurs en capital, de Boeck
Verstraete T., Proposition d’un cadre théorique pour la recherche en entrepreneuriat : PhE = f [ (C x S x P) ⊂ (E x O) ], Editions de l’ADREG, décembre, 2003 (ISBN 2-9518007-6-2) lien
Ce thème est important, comme en témoigne la longueur exceptionnelle de cette note.
Sur le plan académique, on pourra s’accorder avec Chell (2008) pour considérer le profil d’un individu comme un ensemble de traits pouvant faire l’objet de différentes lectures (cognitive, biologique, psychanalytique, …).
« Maddi (1980, p. 10) définit la personnalité comme « un ensemble de caractéristiques et de tendances qui détermine les points communs et les différences du comportement psychologique — pensées, sentiments et actions — des gens, comportement qui présente une continuité dans le temps et ne peut être aisément attribué aux seules pressions sociales et biologiques du moment». Les traits de personnalité apparaissent comme des caractéristiques intrinsèques et plutôt stables d’un individu, qui influenceront la façon dont il s’adaptera à son environnement (Robbins, Judge et Gabilliet, 2006). » (Lechat, 2014, P.129).
Dans le domaine de recherche en entrepreneuriat, il s’agit de s’interroger sur l’existence d’un profil type de l’entrepreneur pour distinguer, d’un côté, les individus entrepreneurs ou susceptibles de le devenir, de ceux, d’un autre côté, qui n’entreprennent pas ou ne passeront pas à l’acte.
Les spécialistes se rappelleront le débat entre, d’une part, Carland et al. (1984, 1988) et, d’autre part, Gartner (1988). Ce dernier se montrait partisan d’une approche behavioriste (on serait entrepreneur par ce que l’on fait et pas par ce que l’on est). Il utilisa le texte de ses collègues pour fustiger l’idée d’un profil type en termes de traits ou de caractéristiques.
Carland et al. ont répondu aux attaques de Gartner, notamment pour dire que leur premier texte ne visait pas à dire qui était entrepreneur et qui ne l’était pas ; il faudra comprendre que ce texte a servi de prétexte à Gartner pour passer quelques idées. Plus récemment, Gartner aurait également pu réagir à la proposition de Nicolaou et Shane (2009) de convoquer la génétique pour envisager des travaux permettant d’expliquer que certains individus se lancent dans l’aventure entrepreneuriale.
Quoiqu’il en soit, et si on reste loin du roman « Le meilleur des mondes » d’Huxley ou du film «Bienvenue à Gattaca » de Niccol, certains diraient « qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain » pour émettre l’idée que si le profil type est discutable, la récurrence de certains traits est troublante.
Sur le plan pratique, il faut retenir que les partenaires veulent savoir à qui ils ont à faire. S’ils ne connaissent pas les théories de la sphère académique sur les traits de l’entrepreneur, à leur façon, ils tentent de cerner la personnalité du porteur défendant son projet. Dans cette note, nous incitions l’entrepreneur à se confronter à un ensemble de traits. Cet effort d’introspection l’aidera à mieux se connaître, pour mieux se «vendre» (on se vend mieux quand on se connaît bien). Il comprendra aussi que bien souvent ces traits se combinent (ex : être tenace dans la mobilisation de la créativité).
Nous ne discuterons pas, ici, le caractère inné des traits évoqués (cf. débat entre l’inné et l’acquit), sauf à relever que les parcours de vie peuvent conduire à les révéler. Par exemple, nos activités nous ont conduits à côtoyer des personnes se questionnant sur leur vie professionnelle pour finalement faire émerger la nécessité d’accomplir quelque chose ayant du sens pour elles. La création d’entreprise peut être cette chose.
Citons également ce témoignage d’une enseignante du « Concours Créons Ensemble» du Rectorat de l’Académie de Bordeaux racontant comment certains élèves révèlent leur potentiel créatif alors qu’auparavant ils étaient plutôt discrets lien.
Ceci dit, force est de constater que, autant sur le plan théorique que sur le plan pratique, la délimitation stricte de ce qu’est un trait est difficile. En effet, bien qu’ayant des ressorts psychologiques, certaines caractéristiques évoquées dans la liste présentée ci-dessous se situent à la frontière du trait, de la motivation, du comportement, … Par exemple, la notion de besoin d’accomplissement provient de psychologues ayant travaillé la motivation comme objet de recherche (à titre d’illustration, on lira le texte de Johnson, 1990).
Nous aurons donc ici une conception relativement large pour proposer une liste non exhaustive de traits. Il est possible de cliquer sur chaque lien suivant ce paragraphe pour accéder au trait afférent (dont le contenu proposera un lien retour vers la liste).
Pour aller plus loin :
Carland, J.W., Hoy, F., Carland, J.A.C. (1984). « Differentiating entrepreneurs from small busi- ness owners: a conceptualisation », Academy of Management Review, Vol. 9, n°2, p.384-359
Carland, J.W., Hoy, F., Boulton, W.R. (1988). Carland J.A.C., « Who is an entrepreneur is a question worth asking », American Journal of Small Business, p.33-39
Chell, E. (2008). The entrepreneurial personality : a social construction, Kindle Edition, 2e edition
Gartner, W.B. (1988). « Who is the entrepreneur is the wrong question», American Journal
of Small Business, spring (repris dans Entrepreneurship, theory and practice, Summer, 1989, p 47-68)
Johnson, B.D. (1990). « Toward a multidimentional model of entrepreneurship : the case of achievement motivation and the entrepreneur », Entrepreneurship Theory and Practice, 14(3); p.39-54
Maddi, S. R. (1980). Personality theories, a comparative analysis (4th ed.). Homewood: The Dorsey Press
Nicolaou, N. Shane, S. (2009). « Can genetic factors influence the likelihood of engaging in entrepreneurial activity ?”, Journal of Business Venturing, 24(1), p.1-22
Le locus of control (Loc), proposé par Julian Rotter (1966), est un concept qu’on reliera à la théorie de l’attribution (Heider, 1958 ; Kelley, 1972 ; …). Le Loc représente le sentiment de contrôle qu’un individu peut avoir sur une situation vécue (qu’elle soit heureuse ou malheureuse). Celle-ci résulte-t-elle de facteurs que l’individu considère endogènes (en ce sens, la responsabilité qu’il a dans la situation lui confère un sentiment de maîtrise) ou exogènes (le contrôle est alors imputé à des éléments environnementaux) ? Dans le cadre de la réalisation d’une tâche, la performance d’un individu dépendrait, d’une part, de forces dispositionnelles, par exemple ses aptitudes, ses capacités, son intention, ses efforts et, d’autre part, de forces situationnelles telles que la chance ou la malchance, la difficulté de la tâche, etc. (Deschamps, Clémence, 1990). Très concrètement, un individu pourra attribuer le succès ou l’échec dans la réalisation d’une tâche à des éléments d’ordre interne (internal locus of control), ou à des causes externes (external locus of control).
Ainsi, le Loc aide à comprendre la façon dont un individu explique ce qui lui arrive, notamment par les causes qu’il attribue aux effets de cette situation. Dans le domaine de la recherche en entrepreneuriat, c’est principalement pour expliquer le passage à l’acte entrepreneurial que le concept a été convoqué, il ne s’y restreint toutefois pas : « Currently, the construct seems to have a renewed following (Rauch and Frese 2007). Locus of control is involved in the formation of entrepreneurial intentions (Krueger 2009; Monsen and Urbig 2009; Monsen et al. 2010), in the start-up process (Herron and Sapienza 1992; Keh et al. 2002; Korunka et al. 2003), and in motivating entrepreneurial behavior (Mueller and Thomas 2001). » (Schjoedt et Shaver, 2012, p.714).
Plus prosaïquement, on reconnait généralement à l’entrepreneur le souhait de vouloir contrôler ce qui lui arrive. Autrement dit, c’est un individu qui apprécie peu l’idée de ne pas être aux commandes de sa vie. L’entrepreneur veut maitriser son destin. L’expression est certes paradoxale, puisque s’il y a destin, alors la trajectoire échappe au contrôle de celui qui le subit. Mais force est de constater, et sans imaginer ce trait comme exclusivement réservé aux entrepreneurs, que ces derniers veulent piloter leur vie, la prendre en main. Même lorsqu’ils évoquent un facteur exogène (la chance, la rencontre, la croyance, etc.) pour expliquer leur réussite, l’étude de leur cas révèle souvent un souhait de maîtrise et des actions conduites en ce sens. Parfois, ce n’est pas sans poser des problèmes lorsque l’entreprise présente un potentiel de développement, puisque l’entrepreneur peut éprouver des difficultés à déléguer, persuadé que ce qu’il fait lui-même garantit sa réussite (voir sur ce point certaines théories du cycle de vie de l’entreprise, par exemple Greiner, 1972 ou Adizes, 1981). Un conseiller l’aidera alors à déléguer et à mettre en place, de façon consubstancielle, un contrôle (sans excès pour ne pas engendrer des coûts excessifs, y compris cachés).
Mais plus largement, qui n’a pas dans son entourage une personne dont le comportement dénote d’un souhait de maîtrise, de tout ou partie de ce qui la concerne.
A vous de jouer :
1/ Trouver des séquences cinématographiques illustrant le LOC (à l’instar de celle-ci lien)
2/ Etes-vous de tendance «Internal Locus of Control », ou de tendance « External Locus of Control » et quels avantages et inconvénients leur attribuez-vous ?
3/ Pensez-vous que l’Internal Locus of Control puisse avoir un lien avec le refus de croissance de certains propriétaires-dirigeants de PME ?
Pour aller plus loin :
Adizes, I. (1981). Les cycles de vie de l’entreprise – diagnostic et thérapie, Paris : Les éditions d’Organisation
Deschamps, J-C., Clémence, A. (1990). L’attribution, Delachaux et Niestlé
Greiner, L.E. (1972). « Evolution and revolution as organizations grow», Harvard Business Review, Juillet-Août
Hansemark, O. C. (2003). « Need for achievement, locus of control and the prediction of business start-ups: A longitudinal study ». Journal of Economic Psychology, 24(3), 301-319
Heider, F. (1958). The Psychology Of Interpersonnal Relations, New York, Weiley
Kelley, H.H. (1972). « Causal schemata and the attribution process » in Jones et al., Attribution : perceiving causes of beharviour, Morriston, NJ, General learning Press
Rotter, J.B. (1966). « Généralized expectancies for internal versus external control of reinforcement», Psychological Monographs, 80
Schjoedt, L., Shaver, K. G. (2012). « Development and validation of a locus of control scale for the entrepreneurship domain », Small Business Economics, 39(3), p713-726.
Mayer (1999) s’appuie sur les contributions d’un ouvrage dédié à la créativité pour poser une première question : « First, is creativity a property of people, products, or processes ? » (p.450). Il constate qu’en fonction de la réponse donnée, l’étude de cet objet conduit à se focaliser soit sur la créativité propre aux individus (ex : caractéristiques distinctives), soit sur les situations produisant la créativité (ex : simulation informatique), soit sur le processus cognitif activé (ex: mise au jour d’étapes dans la production créative). Il s’interroge également sur le caractère commun ou rare de la créativité. Il remarque alors que certains chercheurs étudient la façon dont tout individu peut mobiliser sa créativité dans le processus de résolution de problème, tandis que d’autres s’intéressent aux individus identifiés comme créatifs pour comprendre leur caractéristiques ou leurs prérequis à l’épisode créatif. Une autre question concerne la singularité éventuelle des domaines créatifs. Il lui a répondu que, par exemple, la créativité dans un contexte artistique n’est pas identique à celle conduisant à une découverte scientifique (ajoutons, et sans doute également différent dans le domaine de la culture, du sport, de la politique, militaire, etc.). Suite à la formulation de quelques autres questions, et sans omettre de signaler des divergences repérées, il identifie un consensus sur l’objet de recherche : la créativité s’exprime lorsque quelqu’un (on ajoutera qu’il peut s’agir d’un collectif) crée un produit (au sens large du terme, cela peut être une idée, mais également une œuvre artistique, etc.) original et nouveau.
Ici, la créativité est considérée comme une capacité, une attitude, un processus, une action liée à la résolution d’un problème, une originalité, etc. Elle peut tout à fait faire l’objet d’une lecture individuelle ou d’une lecture collective. Dans ce dernier cas, elle est un phénomène social ambivalent. En effet, la création est alors soit une production résultant d’une expression collective (par exemple, une équipe entrepreneuriale ou un groupe de salariés d’une entreprise réunis dans une séance de créativité), soit un mouvement social réagissant à un produit créatif (par exemple, un marché peut rejetter un produit nouveau, alors qu’en l’acceptant il met souvent au jour de nouveaux usages non forcément pensés par le producteur de l’idée originale). Dans le domaine de l’entrepreneuriat, la créativité est souvent associée à la faculté de générer des idées, plutôt nouvelles et originales, puis d’imaginer les moyens de leur concrétisation et de leur adoption par l’environnement. Certains auteurs la considèrent comme un élément incontournable pour comprendre la genèse de l’entrepreneuriat (Brazeal, Herbet, 1999) ; plus anciennement, elle était liée à l’innovation (cf. Schumpeter, 1935).
La créativité peut être révélée par différent moyens, parmi lesquels des mises en situation conduisant à être créatif ou par des méthodes visant à exploiter la créativité d’un individu ou d’un groupe d’individus (brainstorming, brain post-it, carte mentale, concassage, analogie, PMI, etc.). La créativité est sous contingences multiples. Elle ne saurait aucunement être sous l’influence unique de l’intelligence, laquelle suscite d’ailleurs débat (Carrier et Gélinas, 2011).
Dans le domaine stratégique, la créativité concerne les approches dites « heuristiques ». Piatelli Palmarini (1995) nous rappelle que le mot « heuristique » partage la même racine que le mot « Eurêka », dont l’origine grecque signifie « trouver ». Les heuristiques sont des stratagèmes mentaux spécifiques mobilisés pour la résolution de problèmes. Elles partent de règles simples et approximatives et sont implicites ou explicites, conscientes voire inconscientes. Desreumaux (1993) présente quelques méthodes heuristiques mobilisables pour la réflexion stratégique, c’est-à-dire celles faisant appel à la créativité, à l’intuition et au jugement des individus (il liste également les méthodes analytiques).
Plus pratiquement, nous reviendrons sur le thème de la créativité lors du chapitre 5, pour présenter quelques méthodes aidant à générer des idées d’affaires ou à travailler celles-ci. Cette perspective méthodologique considère la fulgurance davantage comme une expression jaillissant d’un contexte favorisant la créativité (alors qu’elle pourrait être perçue comme une grâce touchant certains individus …). Dans ce registre, il est intéressant de lire les travaux d’Amabile, proposés en bibliographie, portant sur la créativité en contexte organisationnel.
A vous de jouer :
1/ Discuter la créativité attribuée à certains personnages qualifiées de génie (quel que soit le domaine: artistique, culturel, sportif, militaire, politique, …).
2/ Discuter le propos de Thomas Edison : « Le génie est fait de deux pour cent d’inspiration et de quatre-vingt-dix-huit pour cent de transpiration ».
3/ Avez-vous été créatif, êtes-vous créatif, serez-vous créatif ? Dans quel domaine ? Racontez !
4/ Dans quelle mesure la créativité s’exprime-t-elle différemment dans les domaines de l’art, de la culture, du sport, des affaires, de l’architecture, de la recherche et dans bien d’autres ?
Pour aller plus loin :
Amabile, T.M., (1988). « A model of creativity and innovation », dans Staw, B.M., Cumming, L.L. (dir). Research in organizational behavior, Greenwich, JAI Presse
Amabile, T.M. (1998). « How to kill creativity », Harvard Business Review, 76(5), septembre octobre
Brazeal, D.V., Herbert, T.T., (1999). « The genesis of entrepreneurship», Entrepreneurship Theory and Practice, 23(3), p29-45
Carrier, C. Gélinas, S. (2011), Créativité et gestion – les idées au service de l’innovation, Presses de l’Université du Québec
Desreumaux, A. (1993). Stratégie, Dalloz
Dorly, C., Lacour, L., Marnette, C. (2012), « Éditorial », Cahiers jungiens de psychanalyse, 135(1)
Mayer, R. (1999). « Fifty Years of Creativity Research ». In Handbook of Creativity, sous la dir. de Robert. Sternberg, p.449-460, New-York: Cambridge University Press.
Schumpeter, J.A. (1935). Théorie de l’évolution économique, Paris : Dalloz
Verstraete, T. (2002). Essai sur la singularité de l’entrepreneuriat comme domaine de recherche, Les Editions de l’ADREG lien
Avoir une vision ne relève pas, ici, de la lecture d’une boule de cristal. La vision, pour ce qui nous intéresse, est une capacité à « voir » une possibilité de faire des affaires là où d’autres ne la perçoivent pas. Autrement dit, il n’y a rien de métaphysique à dire qu’un entrepreneur est visionnaire. Schumpeter (1935) parlait simplement de « coup d’œil» et disait (p.122) : « les actions et les réactions de l’entreprise projetée ne peuvent être saisies de manière à être entièrement connues et épuisées … pour le succès tout dépend du coup d’œil, de la capacité de voir les choses d’une manière que l’expérience confirme ensuite » (pour quelques développements, voir p.47 et suivantes du document suivant lien) ; Kirzner (1979) parle de « vigilance».
La vision ne se restreint pas à une capacité à détecter une opportunité d’affaires, elle comporte les éléments organisationnels mis en œuvre pour l’exploiter ainsi qu’une dimension prospective et se construit sur la base d’une intention. Elle concerne un ensemble de schémas cognitifs générant une représentation tournée vers le futur. Selon Bennis et Nanus (1986), pour choisir une orientation, le dirigeant doit d’abord s’être fait une image mentale d’un état futur possible et souhaitable de l’organisation. Avec Filion (1991), la vision porte sur la place des produits ou des services sur les marchés dans ce futur et le type d’organisation nécessaire pour y parvenir. Avant de s’intéresser au BM, Verstraete (1997, 1999, 2001) relevait 6 composantes devant être travaillées pour mettre au point une vision :
• Le positionnement du projet dans des environnements multiples ;
• La configuration organisationnelle nécessaire, d’une part, à la fabrication du produit (ou du service) attendu par les marchés et, d’autre part, à l’optimisation des relations avec les catégories de partenaires.
• L’apprentissage tiré des relations avec les partenaires ;
• La performance toujours vis-à-vis de ces partenaires pour ne pas les perdre ;
• L’intégration des caractéristiques intrinsèques de l’entrepreneur, c’est-à-dire ses ressources cognitives servant la mise au point de la vision, sans oublier sa capacité de conviction, etc.
• La mise en place des politiques relationnelles afférentes à l’optimisation évoquée dans le point précédent (politique salariale, politique d’achat, politique marketing, politique financière, etc.).
Aujourd’hui, on s’intéressera particulièrement à la vision que le porteur du projet a du BM 2.10. Evidemment, il ne faudra pas oublier les travaux sur la vision stratégique, et on lira avec intérêt le texte de Cossette (2003), un des experts mondiaux de la cartographie cognitive, à la fois pour la synthèse qu’il livre de la littérature sur la vision stratégique et la méthode qu’il propose pour aider le dirigeant à mettre au point sa vision, cet effort ayant une influence sur les résultats de l’entreprise.
Enfin, l’intérêt porté à la vision, notamment dans son caractère prospectif, pourrait laisser croire que le créateur d’entreprise a un but clair. Dans les faits, il n’a pas obligatoirement pleinement conscience des engagements qu’il prend ni du but qu’il poursuit. Selon un principe réflexif étudié par les sociologues, notamment, l’action peut amender le but voire le révéler, et évidemment le préciser. Qui plus est, « les buts ne sont qu’une manière commode de désigner le produit d’interactions complexes entre des projets (qu’il ne faudrait tout de même pas évacuer), des phénomènes émergents et des opportunités » (Koenig, 1990, p.15). Enfin, une fois entreprise, l’action entre dans un univers d’interaction (cf. Morin, 1990) et son initiateur n’en plus obligatoirement le pilote. La métaphore de la boule de billard (cf. encart suivant) illustre ce point.
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Déterminisme, action et intention : la métaphore de la boule de billard.
Prenons ici l’exemple d’une boule de billard qui est entrée dans le trou de la table. Quel est le facteur ayant amené ce résultat? La boule est entrée dans le trou parce qu’une autre boule est venue la frapper à tel endroit, avec telle force et tel effet. Cette dynamique se prête à formalisation mathématique et il devient facile de convaincre que la boule est entrée dans le trou pour la raison évoquée. C’est ainsi que l’on démontre aux lycéens de filières techniques le jeu des forces à l’œuvre dans la nature. Une telle explication amène à se satisfaire de la dimension purement matérielle pour l’appréhension d’un phénomène. Toutefois, en élargissant l’espace d’étude, on peut dire qu’il y a une cause au fait que la seconde boule est venue frapper la première, c’est que la queue est venue elle-même frapper cette seconde boule à tel endroit, avec telle force et tel effet. Ainsi de suite. On reste dans un univers d’interactions physiques mais tôt ou tard l’univers immatériel vient interagir avec l’univers matériel, en fait on en arrive au désir du joueur de mettre la boule dans le trou. Est-il possible de formaliser son intention, sa pensée ? On en arrive au cerveau, aux neurones, aux synapses et leurs relations à la pensée, à tenter de relier « biologie et connaissance », puis biologie-connaissance-action, puis biologie-connaissance-action-résultat …
Mais n’y a-t-il pas erreur d’interprétation dès le départ ?… Ce n’était peut-être pas l’intention du joueur de mettre cette boule-là dans le trou, c’est un accident, un coup de chance, ou un hasard… L’erreur d’interprétation sur l’intention du joueur peut avoir été induite par son attitude avant, pendant ou après.
Et qu’en est-il lorsque l’information qui nous est donnée provient d’une action à laquelle nous n’avons pas assisté. À partir de la représentation de l’individu ayant fourni l’information nous reconstruisons une réalité. De plus lorsqu’un individu acteur de la situation contée se justifie, « on peut le soupçonner de relire son action en remodelant ses intentions de façon compatible avec les indices qu’il a fournis… Cette compatibilité ne garantit en rien l’authenticité des justifications » (Livet, 1993, p.303), l’acteur lui-même ayant des difficultés à savoir ce que fut son intention initiale. Cela renvoie au thème de la « rétrospection», dont Kœnig (1996) nous rappelle l’origine ethnométhodologique.
Il est toujours possible de donner à nos propres actions une interprétation différente de ce qu’elles semblaient avoir, même en s’appuyant sur des événements physiques car « il est toujours possible de rendre compte des événements physiques par des interprétations différentes, de rajouter des arrière-pensées, ou simplement de relier l’action à des traumatismes lointains plutôt qu’à des causes prochaines, etc. Cette équivocité naît paradoxalement dès le moment où nous revendiquons pour notre action telle visée, telle intention que nous demandons (explicitement ou implicitement) à autrui de reconnaître comme nôtre. Car si nous avons besoin d’expliciter notre intention, c’est qu’on pourrait en donner une autre interprétation » (Livet, 1993, p.295).
L’exemple de la boule de billard nous aide à admettre que même lorsque le résultat s’est produit, ses causes peuvent se prêter à spéculation et que la «vérité» elle-même est contingentée de facteurs soumis au jeu de l’interprétation.
Verstraete, 1999, p. 101-103
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A vous de jouer :
1/ Avez-vous eu des «visions» (au sens ici entendu, évidemment … 🙂 ) ?
2/ Identifier des «visionnaires» (ex : Jules Vernes), notamment dans le cadre de projets entrepreneuriaux (ex : Steve Jobs) ?
Pour aller plus loin :
Bennis, W., Nanus, B. (1986). Diriger: Les secrets des meilleurs leaders. Paris : Interéditions
Cossette, P. (2003). « Méthode systématique d’aide à la formulation de la vision stratégique : illustration auprès d’un propriétaire dirigeant », Revue de l’Entrepreneuriat, 2(1)
Filion, L.-J. (1991), Visions et relations : clés du succès de l’entrepreneur, Les éditions de l’entrepreneur, Montréal
Kirzner, I.M. (1979). Perception, opportunity and profit, Chicago, University of Chicago Press
Kœnig, G. (1996). « Management: les constructeurs. K E. Weick », Revue Française de Gestion, n°108, mars-avril-mai
Livet, P. (1993). Livet P, « Théorie de l’action et conventions », dans Quéré (dir), La théorie de l’action. Le sujet pratique en débat, CNRS Éditions
Schumpeter, J.A. (1935). Théorie de l’évolution économique, Paris : Dalloz
Morin, E.. (1990). Introduction à la pensée complexe, ESF éditeur, Paris
Verstraete, T. (1997). Modélisation de l’organisation initiée par un créateur s’inscrivant dans une logique d’entrepreneuriat persistant. Les dimensions cognitive, praxéologique et structurale de l’organisation entrepreneuriale, Thèse pour le Doctorat de l’Université en sciences de gestion, Lille
Verstraete, T. (1999). Entrepreneuriat. Connaître l’entrepreneur, comprendre ses actes, L’Harmattan, collection Economie et Innovation
Verstraete, T. (2001), « Le phénomène entrepreneurial », Revue de l’Entrepreneuriat, 1(1), 2001, p.5-24 lien
Dans les faits, certains individus éprouvent le besoin de «réaliser» quelque chose pour «se réaliser». La réalisation, ou plutôt les réalisations car elles peuvent être multiples, prennent des formes très diverses : fonder une famille, atteindre le sommet d’une montagne, réunir une communauté autour d’un projet, battre un record du monde ou participer à un défi plus modeste, organiser une manifestation, écrire un livre, apporter une aide ou un service à une population, etc. Ces individus donnent ainsi un sens à certaines dimensions de leur vie et accroissent leur estime de soi.
Au même titre que le sportif de haut niveau se réalise dans le domaine du sport, l’artiste dans le domaine de l’art, l’intellectuel dans le domaine de la culture, etc., l’entrepreneur se réalise dans les affaires, lesquelles peuvent s’entendre selon une large acception et concerner le sport, la culture, le social, …
Sur le plan théorique, le lecteur aura peut-être lu Maslow (1943), dont le travail discuté place l’accomplissement au sommet d’une pyramide des motivations comportant cinq niveaux. S’agissant de l’entrepreneur, McClelland (1961) défend l’idée que le besoin d’accomplissement est lié à la propension de l’individu à passer à l’acte de création d’entreprise. Son travail est également discuté, entre autres dans la corrélation qu’il établit entre croissance économique et besoin d’accomplissement (Emin et Philippart, 2015). Selon Filion (1997), convoquant notamment Gasse (1982) et Brockhaus (1982), le besoin d’accomplissement ne suffit pas pour expliquer le passage à l’acte de création d’entreprise. Collins, Hanges et Locke (2004) font ressortir une corrélation significative entre le besoin d’accomplissement et le choix d’entreprendre ; ils remarquent que cette corrélation accroit la performance des individus étant effectivement passés à l’acte.
Sur le plan pratique, le « candidat entrepreneur » s’interrogera pour être convaincu que son projet d’entreprendre lui permet de se réaliser ; les apporteurs de ressources susceptibles de s’engager auront souvent un regard critique sur ce point. Le bonheur au travail, ici dans le projet d’entreprendre, appelle une réalisation personnelle à laquelle les jeunes générations semblent particulièrement sensibles (Claire, 2012 ; Gabarret et al, 2016). A l’instar de ce qui est qualifié d’entrepreneuriat social (expression à tendance pléonastique car l’entrepreneuriat est un phénomène social ; les partisans de l’entrepreneuriat social marquent ainsi leurs valeurs par l’idée que les projets inscrits dans ce domaine mettent l’économique au service d’une finalité sociale), la génération Y peut voir l’entrepreneuriat comme un mode de professionnalisation autorisant d’autres finalités, voire au service d’un mode de vie globalement équilibré.
A vous de jouer :
1/ Avez-vous déjà ressenti le besoin de réaliser quelque chose ?
2/ En quoi vos réalisations vous ont-elles apporté ? En quoi ont-elles apporté à d’autres acteurs ?
3/ Aujourd’hui, dans quel(s) domaine(s) aimeriez-vous réalisé quelque chose, pour vous, ou pour les autres ?
Pour aller plus loin :
Brockhaus, R.H. (1982), « The psychology of the entrepreneur », dans Kent, C.A. et al, Encyclopedia of entrepreneurship, Englewood Cliffs, N.J., Prentice-Hall p.39-57 (source : Filion, 1997)
Claire, L., (2012), « Re-Storing the Entrepreneurial Ideal: Lifestyle Entrepreneurs as Hero? », Tamara Journal for Critical Organization Inquiry, Vol. 10, Issue 1, pp. 31-39.
Collins, C.J., Hanges P.J., Locke, EA. (2004). « The relationship of achievement motivation to entrepreneurial behavior : a meta-analysis », Human Performance, 17(1), p.95-117
Emin, E., Philippart, P. « David Clarence McClelland. La motivation de l’entrepreneur, dans Messeghem, K. et Torrès, O. (dir.). Les grands auteurs en entrepreneuriat, Ems Management et Sociétés
Filion, L.-J. (1997), « Le champ de l’entrepreneuriat : historique, évolution, tendances », Revue Internationale PME, 10(2), p. 130-172
Gabarret, I., Vedel, B., Etzol, P. (2016)., « Quelles valeurs se cachent derrière la motivation des jeunes étudiants-entrepreneurs?», Gestion 2000, 33(2), p. 233-253
Gasse, Y. (1982). « Elaboration on the psychology of the entrepreneur », dans Kent, C.A. et al, Encyclopedia of entrepreneurship, Englewood Cliffs, N.J., Prentice-Hall p.57-66 (source : Filion, 1997)
Maslow A.H. (1943). « A theory of human motivation », Psychological Review, 50, p.370-396
McClelland, D.C. (1961). The achieving society, Princeton, New Jersey
La confiance en soi touche d’autres concepts avec lesquels elle peut s’amalgamer, tels que compétence, compétence perçue, concept de soi, estime de soi, contrôle perçu, attentes de succès, sentiment d’efficacité personnelle. « L’idée centrale commune à ces notions est que la confiance d’un individu en sa capacité à réaliser une tâche donnée détermine en partie la façon dont il va faire face à cette tâche et le niveau de performance qu’il va effectivement atteindre, pour peu que celle-ci dépende au moins en partie des actions de l’individu. La plupart des conceptions actuelles de la motivation partagent ainsi l’idée que les croyances qu’a une personne en ses capacités à réussir joue un rôle crucial dans son engagement et ses performances, autrement dit que la confiance en soi est un facteur clé de la dynamique motivationnelle des individus.» (Galand, 2011, p.255 et 256). Ceci dit, la confiance en soi n’est pas innée, et ce sont plutôt les autres qui perçoivent, chez un individu, la confiance en soi (cette personne ne s’interrogeant souvent pas, elle-même, à ce propos).
En psychologie, c’est le concept d’estime de soi qui a fait l’objet d’une attention soutenue (principalement dans son association à des facteurs de santé mentale tel que la dépression, l’anxiété, l’impulsivité, l’irritabilité, etc. cf. Vallières et Vallerand, 1990). Selon Rosenberg (1985), l’estime de soi réfère à la façon dont un individu accepte avec satisfaction ce qu’il est, sans pour autant avoir un sentiment de supériorité.
Partant des travaux de Bandura (1977) désignant, par l’auto-efficacité, la croyance que possède un individu en sa capacité à accomplir une tâche, le domaine de l’entrepreneuriat a proposé de définir l’ESE (Entrepreneurial Self-Efficacity) comme l’application de ce concept aux tâches entrepreneuriales. Selon une recherche conduite par Chen, Greene et Crick (1998), l’ESE serait un facteur permettant de distinguer les entrepreneurs des managers. Ils en tirent des enseignements pour, entre autres, affirmer que les formations à l’entrepreneuriat ne peuvent se restreindre à une montée en compétences en gestion, mais doivent confronter les apprenants à l’innovation et à la prise de risque. Autrement dit, les formations en entrepreneuriat gagnent à combiner les aspects techniques aux éléments cognitifs plus directement reliés aux croyances des candidats à l’entrepreneuriat, à leurs attitudes et à leurs perceptions des tâches réalisées, sans oublier de travailler les conditions d’apprentissage. En effet, ces dernières nécessitent des contextes à difficultés grandissantes de sorte à progressivement favoriser l’ESE. L’idée est également de placer les apprenants en contexte de nouveauté car il semble que gérer avec succès la nouveauté ou le changement développe la croyance de l’entrepreneur en sa capacité à agir (Schere, 1982). Qui plus est, Miao, Qian et Ma (2017) relient l’ESE aux performances financières des entreprises et remarquent son importance dans les environnements risqués et incertains.
A vous de jouer :
1/ Identifier des personnes vous semblant avoir «confiance en soi. »
2/ Demander à votre entourage s’il leur semble que vous avez confiance en vous
3/ La confiance en soi peut-elle se travailler ?
Pour aller plus loin :
Bandura, A. (1977). Social Learning Theory, Englewood Cliffs, NJ: Prentice Hall.
Galand, B. (2011). « Chapitre 17. Avoir confiance en soi », in Étienne Bourgeois et al., Apprendre et faire apprendre, Presses Universitaires de France, p. 255-268.
Chen, C.C. Greene, P.C. Crick, A. (1998). « Does entrepreneurial self-efficacity distinguish entrepreneurs from managers?», Journal of Business Venturing, 13(4), p.295-316
Schere J.L. (1982). « Tolerance of ambiguity as a discriminating variable between entrepreneurs and managers », Academy of Management Proceeding, p. 404-408
Vallières, E.F., Vallerand, R.J.(1990). « Traduction et validation canadienne-française de l’échelle de l’estime de soi de Rosenberg», International Journal of Psychology, vol.25.
Le caractère ambiguë d’une situation découle des diverses interprétations qu’elle peut générer chez l’individu qui la vit. La tolérance à l’ambiguïté se définit comme une capacité à gérer une situation nouvelle, complexe ou insoluble (Budner, 1962). Les « intolérants » à l’ambiguïté perçoivent ces situations comme menaçantes (ibid). Ils tendent à souhaiter des situations non ambiguës et à réduire leurs interprétations à un cadre ambivalent : « Low ambiguity tolerance is shown by the desire to have everything reduced to black and white … » (English et English, 1958, p.24, tiré de Mac Donald, 1970).
En psychologie, des échelles ont été conçues pour apprécier ce trait de personnalité (Budner, 1962 ; McLain, 1993) pouvant évoluer par apprentissage, comme le montrent les travaux comparant les experts aux novices (pour une illustration récente dans le contexte de l’interprétariat, voir Rosiers et Eyckmans, 2017).
L’expérience de la nouveauté favorise la tolérance. Dans le domaine de l’entrepreneuriat, le texte de Schere (1982) incite à placer les candidats-entrepreneurs face à des situations conduisant à progressivement affronter les situations ambiguës, lesquelles incluent généralement des éléments nouveaux qui, lorsqu’ils sont assimilés par des décisions conduisant à agir avec succès, renforcent l’ESE 4.5. Dans la mesure où les travaux convergent pour montrer que la tolérance à l’ambiguïté favorise la réalisation de tâches relevant de situations ambiguës (auxquelles sera inéluctablement confronté l’entrepreneur), la pédagogie de l’entrepreneuriat gagne à favoriser la mise en contexte tandis que l’accompagnement alertera ou expliquera aux intéressés que c’est l’occasion d’un apprentissage. Il reste à considérer, d’une part, qu’à un moment donné, le degré de tolérance à l’ambiguïté d’un individu sera plus ou moins élevé et, d’autre part, qu’il est certes parfois difficile de faire progresser un intolérant … Alors que certains sont bloqués par la difficulté d’opter pour une interprétation permettant d’agir, d’autres assument leur choix et entrent dans un jeu réflexif liant cognition et action (on se réfèrera au courant de la sociologie de l’action par exemple pour avancer dans cette perspective).
Enfin, il ne faudrait pas croire que l’intolérance à l’ambiguïté conduit les individus intolérant à tout vouloir programmer, la programmation pouvant par ailleurs révéler l’ambiguïté des situations à venir … Et il est tout à fait possible qu’un individu tolérant l’ambiguïté aime planifier ses activités, qu’elles soient de nature personnelle (ex : les vacances) ou de nature professionnelle (ex : les chantiers).
A vous de jouer :
1/ En contexte de création d’entreprise, dans quelle mesure l’estimation d’un chiffre d’affaires relève-t-elle d’une situation ambiguë ? Pourquoi ?
2/ En contexte d’entreprise établie, l’éventuelle ambiguïté est-elle la même ? Pourquoi ?
3/ Retrouver des situations que vous avez vécues comme ambiguës pour vous rappeler la façon dont vous vous y êtes confronté, puis en discuter.
Pour aller plus loin :
Budner, S. (1962). « Intolerance of ambiguity as a personality variable», Journal of Personality, 30, p.29-50
English, H.B., English, A.C. (1958), « A comprehensive dictionary of psychological and psychoanalatical terms », New York : McKay (source : Mac Donald, 1970)
Mac Donald A.P. (1970). « Revised scale for ambiguity tolerance: reliability and validity», Psychological Reports, 26, p.791-798
McLain, D. L. (1993). « The MSTAT-I: A new measure of an individual’s tolerance for ambiguity». Educational and Psychological Measurement, 53(1), 183-189.
Rosiers A., Eyckmans, J. (2017). « Investigating tolerance of ambiguity in novice and expert translators and interpreters : An exploratory study », Translation & Interpreting, 9(2), p.52-66
A propos de l’empathie, dans son récent numéro 293 de 2017, la revue Sciences Humaines dit : « Inexistant dans la langue française il y a un demi-siècle, le mot « empathie » a surgi du néant. L’empathie a été depuis promue au rang des enjeux humains les plus fondamentaux. La prolifération des publications sur le sujet est un signe qui ne trompe pas. L’empathie est à la mode. Pour les uns, elle serait le fondement même de la morale, de la coopération et de l’attention à autrui, autant dire de l’humanité.». Dans ce même numéro, Dortier distingue l’empathie cognitive (capacité à comprendre les pensées ou l’intuition d’autrui), l’empathie affective (capacité à comprendre les émotions d’autrui) et l’empathie compassionnelle (sollicitude entrainant une attitude bienveillante à l’égard d’autrui, autant dans ses joies que dans ses peines). La philosophie, la psychologie et la psychanalyse étudient cet objet, mais également désormais le management, notamment dans ses liens avec les thèmes de la responsabilité, de l’accountability, du management humaniste (on pourra consulter le numéro 7 de 2013 de la Revue Interdisciplinaire Management, Homme & Entreprise).
Dans le domaine de l’entrepreneuriat, l’empathie peut être vue comme un facteur favorisant la conception d’un BM puisque ce dernier étant une représentation partagée, la capacité de l’entrepreneur sur les trois registres empathiques rappelés précédemment participe à l’intégration des attentes des possesseurs de ressources appelés à devenir des parties prenantes, à la compréhension des conventions ou règles du jeu des contextes sociaux traversés et à imaginer la relation à l’écosystème investi. Néanmoins, l’empathie n’est pas sans risque mais, sur ce point, à vous de jouer …
A vous de jouer :
1/ Relever, globalement, les avantages et les inconvénients de l’empathie.
2/ Relever, pour un entrepreneur, les avantages et les inconvénients de l’empathie.
1/ et 2/ pourront s’appuyer sur des textes publiés traitant des problèmes afférents.
Pour aller plus loin :
Dortier, J.-F. (2017). « Empathie et bienveillance : révolution ou effet de mode », Sciences Humaines, n° 293, juin
rovenant de la physique des matériaux, le concept de résilience s’est diffusé dans les différentes disciplines des Sciences Humaines et Sociales. Elle s’y définit comme une capacité et une attitude positive face à l’adversité d’une situation, notamment face aux chocs et aux échecs. Nous avons interrogé Julien Cusin, Maître de Conférences à l’Institut d’Administration des Entreprises de l’Université de Bordeaux, dont les travaux mobilisent ce concept.
A vous de jouer :
1/ Comment conseiller un ami à réagir face à un échec ?
2/ Comment appliquer les conseils à soi-même ?
Pour aller plus loin :
Cusin, J. (2017). « The Role of the Tutor in the Resilience of the Post-Bankruptcy Entrepreneur: The Case of the 60.000 Rebonds Association», Revue de l’Entrepreneuriat, 17(2) p. 91-122.
Le leadership continue à faire couler beaucoup d’encre, qu’il soit vu comme un trait, une attitude, un style, etc. Ici, on le verra très prosaïquement comme une manifestation incarnée par un individu, voire plusieurs, sachant conduire un groupe, au périmètre variable, vers l’atteinte d’un but plus ou moins précis. Le but est défini par l’individu, par le groupe, par une force extérieure ou par une combinaison de l’ensemble. Autrement dit, le leadership ne se décrète pas, bien qu’il soit possible de se référer au principe de hiérarchie pour désigner, dans une organisation, des leaders (les cadres devraient en être par essence puisqu’ils doivent conduire le groupe de subordonnés vers les objectifs).
On connaît des enfants qui, déjà, dans la cours d’école, veulent commander. Si le leadership et le commandement se rapprochent lorsqu’il s’agit d’identifier des traits propices à la conduite des troupes, les travaux sur le leadership ont largement mis en exergue le caractère polymorphe du leadership, parfois trait, comportement, fonction, formel ou informel, légitime ou pas, … Comme pour l’entrepreneuriat, ces travaux ont montré qu’il était utile de combiner une approche par les traits avec une approche behavioriste du leadership pour le comprendre, puisque des personnes ne présentant a priori pas les traits d’un leader peuvent s’avérer bons leaders une fois placées en situation de leadership. L’entrepreneur est un leader dans le sens où il motive les membres du groupe qu’il réunit autour de son projet à se comporter de façon favorable à ce dernier. Il aura alors une réflexion sur son style de leadership (vaste sujet à nouveau) sans oublier la part de traits psychologiques avec laquelle il doit être cohérent (ex : un autocrate peinera à mettre en place un style participatif, quand bien même on lui en louerait les avantages ; il trouvera sans doute le propos très intéressant, pour les autres …).
De nombreux autres aspects liés au profil peuvent être évoqués et mériteraient sans doute une note spécifique, mais le volume de l’ouvrage deviendrait trop conséquent. Nous évoquerons, en reprenant des propos que nous avons pu antérieurement tenir, quelques aspects auxquels le candidat à l’entrepreneuriat se confrontera.
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• La promptitude à décider et la capacité à improviser : certains environnements méritent leur qualificatif de véloces tant les choses y évoluent vite. Ils semblent parfois plus malléables et appellent surtout des capacités d’improvisation. Cette faculté aide à reconfigurer les ressources pour régénérer le BM dans ce type d’environnement (Benavent et Verstraete, 2000)
• L’engagement concerne la capacité d’un individu à s’engager dans un projet, à s’y investir idéalement totalement. Ce n’est pas facile lorsque, toujours salarié dans un emploi, l’individu doit en même temps élaborer son projet. L’engagement appelle souvent une forte capacité de travail (l’entrepreneur prendra soin d’aménager des périodes de repos, ainsi que des activités différentes telles que le sport, l’art, etc. afin de ne pas sombrer dans le burn-out). Plus le lancement effectif de l’affaire approche, plus celle-ci réclame une exclusivité (hormis peut-être pour la création certaines activités d’appoint). Le candidat à l’entreprise appréciera sa capacité à s’engager, notamment en identifiant, comme le feront certains partenaires, ses réalisations passées. Sa participation financière et le changement de trajectoire qu’implique la création de l’entreprise sont souvent considérés comme des témoins de l’engagement.
• La détermination, la persévérance et la ténacité réfèrent à la volonté d’atteindre un objectif et de s’y tenir en s’y engageant durablement. C’est une caractéristique appréciée car la création d’une entreprise est souvent assimilée à un parcours du combattant. Il s’agit, précocement, d’admettre que les obstacles sont ou seront présents. Evidemment l’entrepreneur ne s’obstinera pas et devra faire preuve, le cas échéant, d’agilité, ses capacités de visionnaire et son écoute aidant à imaginer de nouvelles trajectoires. Elles peuvent aussi l’aider à détecter de nouvelles opportunités d’affaires. Ceci dit, les affaires démarrant, les contacts se multipliant, de nouvelles voies peuvent apparaître tels des mirages d’opportunités non décelées lors de la conception. La révélation de nouvelles affaires est tout à fait possible, mais le créateur n’oubliera pas l’objet pour lequel il a été soutenu et il soumettra toute nouvelle idée à la rigueur méthodologique à laquelle il s’est normalement astreint pour son projet initial.
• Le sens de l’initiative et des responsabilités : a priori, un entrepreneur sait prendre des initiatives. À nouveau, le porteur d’un projet identifiera ses réalisations passées et les responsabilités qu’il y a endossées. La création d’entreprise est un acte où les responsabilités économiques, sociales et juridiques de l’individu sont engagées. Lors de la conception du BM, le créateur a normalement mesuré les responsabilités qu’il a à l’égard de ses parties prenantes.
• L’intégrité : au-delà de son propre système de valeur, le nouvel entrepreneur sera forcément confronté à des partenaires susceptibles d’abuser de sa crédulité, ou de l’emmener dans quelques affaires a priori « juteuses». Ce type de tentations place dans une situation de dépendance peu compatible avec une affaire pérenne. Et si quelques cas sont toujours relatés pour montrer que « tout le monde le fait », ou que la réussite de tel entrepreneur s’explique par la pratique évoquée, on peut aisément trouver au moins autant d’autres cas où les tribunaux sont intervenus pour y mettre fin. L’intégrité touche à l’éthique et aux normes sociales distinguant les manières acceptables de faire des affaires des formes condamnables. Selon Henderson (1982), décider ce qui est bien ou bon, ou mauvais ou mal, s’effectue au sein d’un environnement dynamique conférant à l’acte décisionnel afférent un caractère situationnel. L’éthique peut alors être étudiée comme un processus. Concrètement, les règles évoluent tout comme la société. En conséquence, de ce qui est éthique ou non, de ce qui est légal ou pas, l’auteur identifie quatre possibilités (éthique et légal, éthique et illégal, non éthique et légal, non éthique et illégal). Le créateur hésitant évaluera les conséquences diverses, y compris en matière de notoriété, le plaçant en situation de décider selon ces quadrants. Une façon d’intégrer les différentes situations consiste à imaginer celles-ci pour anticiper ce qu’on déciderait. Par exemple: un client propose un règlement en espèces pour échapper à la TVA, faut-il accepter ou refuser ? Autre exemple : le client demandant un devis est, à l’évidence, plus aisé financièrement que celui rencontré précédemment pour la même demande. La somme demandée pour le même service sera-t-elle plus élevée si les revenus du client apparaissent plus importants?
• La perception et l’estimation des risques : les résultats sur le rapport de l’entrepreneur au risque sont contradictoires, sans doute parce que le risque est également une notion polymorphe (risque pour qui ? Risque sur quoi ? Quel type de risque ? …). Bien que faisant partie des soubassements théoriques fondateurs dans l’étude de l’entrepreneur, force est de reconnaître que le risque se répartit sur l’ensemble des parties prenantes, ce qui justifie la prudence de celles-ci avec la jeune entreprise. Selon Schumpeter (1935), l’entrepreneur ne prend des risques que s’il investit ses propres deniers, combinant alors les fonctions de capitaliste et d’entrepreneur. Certains individus sont peu enclins à le faire, alors que d’autres sont prêts à « jouer » leur patrimoine (c’est le cas de la plupart des dirigeants de TPE/PME). Dans notre expérience d’accompagnement de projet, nous sensibilisons les porteurs à trois types de risque (le risque financier, le risque psychologique et le risque social) pour discuter avec eux la façon de les éviter et sur les façons de les « vivre » lorsque malheureusement ils conduisent à des situations difficiles.
• La résistance au stress n’est pas qu’une réponse au poids des responsabilités, elle est concernée par la quantité de travail, qu’on sait importante, au sentiment qu’ont parfois les entrepreneurs de devoir répondre à des maux qui ne les concernent peut-être pas directement (on remarquera parfois une tendance à la philanthropie chez certains d’entre eux, cf. Blake et al. 2017). Dans un travail doctoral, Thomas Lechat (2014) propose un stressomètre, outil de diagnostic permettant « d’évaluer le nombre de chocs émotionnels vécus sur une période, sachant que leur cumul fragilisera la santé mentale » (p.256 ; l’auteur propose également ce qu’il appelle un satisfactomètre – voir ci-contre).
• La capacité à convaincre, à négocier et à communiquer : convaincre les salariés de travailler, les fournisseurs de livrer, les clients d’acheter, les financeurs de financer, etc., l’exercice de conviction est permanent pour l’entrepreneur et, en conséquence, celui de négocier pour tirer le meilleur de sa relation avec l’autre. Plus sa communication est claire, plus les exercices précédents sont facilités. L’instrumentation de la notion de BM participe à cet effort de clarté. Nous reviendrons sur ce point dans une note dédiée.
• L’ouverture d’esprit et la capacité d’apprentissage: le créateur se lançant pour la première fois dans l’aventure entrepreneuriale va apprendre beaucoup. Son ouverture d’esprit, sa curiosité et sa capacité d’écoute jouent un rôle capital dans cet apprentissage.
Propos tiré de Verstraete, 2010, et amendé
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L’encart de la page précédente ne liste pas, de façon exhaustive, toutes les caractéristiques auxquelles un entrepreneur peut se confronter. Le porteur d’un projet se questionnera sur chaque caractéristique pour apprécier ses aptitudes. Il pourra réaliser un tableau comme celui qui suit (tableau 2).
Pour aller plus loin :
Blake, D. M., Shelby J. S., Kristen, M. (2017). “After the harvest: A stewardship perspective on entrepreneurship and philanthropy”, Journal of Business Venturing, 32(4), p385-404.
Gatewood EJ, Shaver KG & Gartner WB, «A longitudinal study of cognitive factors influencing start-up behaviors ans success at venture creation», Journal of Business Venturing ,10, 1995
Henderson, V. (1982), “The ethical side of enterprise”, Sloan Management Review, Spring
Hornaday, 1982 ; Kuratko et Hodgetts, 2001 ; Kao, 1991
Lechat, T. (2014). Les évènements stressants et satisfaisants de l’activité entrepreneuriale et leur impact sur la santé du dirigeant de PME, Thèse pour le doctorat de l’Université de Montpellier
Verstraete, 1999 ; Vertraete et Saporta, 2006 ; Verstraete et al., 2010, Verstraete et Jouison-Laffitte, 2009, 2011
Si, lors de la note précédente, nous évoquions la difficulté à parfois distinguer clairement la frontière entre un trait de personnalité et une motivation, il reste tout-à-fait possible d’isoler les motivations en demandant à un porteur de projet pourquoi il entreprend. On constate alors que l’entrepreneur est souvent porté par plusieurs motivations, parmi lesquelles, par exemple : la passion, le gain, le désir d’autonomie, la recherche d’un style de vie, la quête de reconnaissance, etc. Il ne les confesse d’ailleurs parfois pas spontanément et certaines de ces motivations permettent de répondre à une autre. Ainsi en est-il de ce jeune passionné de mécanique, cancre à l’école mais pourtant courageux puisque chacun de ses temps libres le conduisait à travailler dans des entreprise agricoles (principalement dans les champs) pour, avec l’argent ainsi gagné, s’acheter une petite moto (une 49,9cm3 au départ, puis une 125). Lorsque, adulte, il a créé une entreprise, sa passion pour les beaux engins ne l’ayant pas quitté, ses revenus lui ont permis d’assouvir pleinement sa coûteuse, mais réelle passion (plusieurs motos, dont une Harley-Davidson qui le faisait rêver lorsqu’il était jeune, plusieurs belles voitures de sport allemandes et une folie italienne …).
Une des premières typologies proposées pour distinguer les motivations des entrepreneurs repose sur la distinction entre les individus tirés (pull) par l’entrepreneuriat et ceux qui sont poussés (push) vers l’entrepreneuriat. Les premiers seraient comme happés par l’entrepreneuriat parce qu’ils ont identifié, le pensent-ils, une opportunité d’affaires. Les seconds y sont poussés par les difficultés de la vie personnelle ou professionnelle et font ce choix n’ayant pas, le pensent-ils, d’autres possibilités d’insertion ou de rémunération. Cette typologie est entretenue notamment par le GEM (Global Entrepreneurship Monitor). Le GEM est un programme récurrent collectant, au niveau international, des données pour aboutir à un rapport permettant de comprendre l’entrepreneuriat dans le monde et d’identifier des différences d’un pays à l’autre lien.
Outre l’entrepreneuriat d’opportunité (pull) et l’entrepreneuriat de nécessité (push), Bayad et al. (2016) en ajoutent deux autres : l’entrepreneuriat de conviction (pull) et l’entrepreneuriat de tradition (push). Ce dernier peut se manifester quand, par exemple, le membre d’une famille entreprend afin de poursuivre le projet de l’entreprise familiale. L’entrepreneuriat de conviction serait la manifestation d’un individu ayant mûrement réfléchi son projet d’entreprendre et, convaincu, passant à l’acte.
Comme pour de nombreuses typologies, il conviendra de nuancer le propos. Pour illustrer, il est possible de prendre le cas d’un héritier potentiel reprenant l’entreprise familiale (entrepreneuriat de tradition, donc de type push), avec enthousiasme car y ayant repéré une opportunité d’insertion professionnelle souhaitée (entrepreneuriat d’opportunité). Autrement dit, les types d’entrepreneuriat ne sont pas antinomiques et peuvent se combiner, comme les types de motivations.
Ainsi, de façon plus prosaïque, tout porteur s’interrogera sur les raisons pour lesquelles il entreprend. Il parlera de cette introspection avec son conseiller. Parmi les motivations les plus régulièrement citées : le gain financier, la survie, la passion (pour le bricolage, la musique, l’informatique, le surf, la cuisine, le secteur d’activité, les personnes à côtoyer, etc.), la quête d’un statut social ou d’un style de vie, le pouvoir, l’indépendance (quoique l’entrepreneur est très lié à ses parties prenantes), l’autonomie (ne pas supporter le poids de la hiérarchie), la transmission de certaines valeurs (cf. entrepreneuriat social), l’accomplissement, le relevé d’un challenge, la conviction d’une idée prometteuse, etc. La liste peut comporter des motivations se prêtant à discussion (ce qui ne veut pas dire qu’elles sont négatives), quand par exemple un porteur de projet veut entreprendre pour faire comme un de ses parents. L’étude des motivations participe à mieux cerner le projet personnel de l’entrepreneur potentiel.
Lorsque le porteur est pluriel, c’est-à-dire lorsque l’individu n’entreprend pas seul mais en équipe, la compatibilité des motivations des protagonistes réunis pour entreprendre fera l’objet d’une discussion ouverte.
A vous de jouer :
1/ Questionner chacune des motivations identifiées pour entreprendre ; exemple : un passionné ne risque-t-il pas de passer plus de temps pour sa passion que pour les affaires ?
2/ Imaginer des cas où les motivations se combinent.
Pour aller plus loin :
Bayad, M., El Fenne, A., Ferry, A. (2016). « Porteurs de projet en recherche d’un nouvel emploi et entrepreneuriat: sortir de la dichotomie opportunité/nécessité», Revue de l’Entrepreneuriat, 15(3), p.205-229.
Krueger, N.F. (1993). « Growing up entrepreneurial ? Some developmental consequences of early exposure to entrepreneurship », Academy of Management
Shapero, A., Sokol, L. (1982). « The Social Dimensions of Entrepreneurship », in C. Kent et al. (dir.), The Encyclopedia of Entrepreneurship, Prentice-Hall, Englewood Cliffs, p.72-90
Sénicourt et Verstraete (2000 lien), ont proposés de distinguer 4 niveaux dans la diffusion d’une culture entrepreneuriale : la sensibilisation, la formation, le conseil et l’accompagnement. En 2010, dans le cadre de la mise en place du statut national Etudiant-Entrepreneur, nous avons localement créé le Pôle de l’Entrepreneuriat Etudiant ECA (Entrepreneuriat Campus Aquitaine ; les Pôles de l’Entrepreneuriat Etudiant sont devenus des PEPITE : pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat en 2014 lien). Ces 4 niveaux ont été particulièrement inspirants mais nous avons mis en œuvre un découpage plus pratique (qui a d’ailleurs également inspiré l’appel lancé en 2014 pour la création des PEPITE) : information, sensibilisation, formation (ou spécialisation), accompagnement. Ce découpage permet d’ajouter le niveau information et d’éviter de livrer une explication difficile entre le conseil et l’accompagnement (en fait, le premier peut être ponctuel alors que le second appelle un suivi, certes relativement, durable).
L’information vise essentiellement à faire connaître la carrière d’entrepreneur et les dispositifs accessibles aux candidats. Elle procède par témoignages, rencontres, présentations réalisées par les institutions de l’écosystème entrepreneurial. Elle consiste essentiellement à poser la question : « avez-vous envisagé la possibilité d’entreprendre?» et à informer sur cette perspective. Il s’agit de montrer que l’entrepreneuriat est une voie d’insertion professionnelle imaginable, que l’individu se mette à son compte ou qu’il entreprenne pour le compte de l’organisation l’employant. Dans ce sens, l’entrepreneuriat est aussi un état d’esprit et une attitude.
La sensibilisation a pour objectif de stimuler la créativité et la prise d’initiative, à rendre la carrière d’entrepreneur non seulement identifiable mais, plus encore, accessible en la démystifiant, à montrer qu’elle répond à des motivations diverses, à comprendre quelques éléments de méthode pour monter un projet. Elle prend idéalement la forme d’un présentiel face à des intervenants accompagnée d’une mise en action des apprentis-entrepreneurs (le « learning by doing » évoqué dans le note 1.5), par exemple en constituant des groupes devant concevoir un BM pour le présenter à un jury. Autrement dit, il s’agit de montrer que l’entrepreneuriat est une voie d’insertion professionnelle non seulement imaginable, mais réalisable.
Les frontières sont parfois floues entre ces deux premiers niveaux. Elles sont également à l’occasion effacées, comme lors de cette remarquable action, conduite en 1997 et reconduite en 1998 par le Groupe Vauban, l’Agence Régionale de Développement, l’Office Central de Coopération à l’Ecole du Nord et celui du Pas-de-Calais. Elle a d’abord consisté à distribuer un livre de classe (en fait deux cahiers) à 200 élèves de CM1 et de CM2 (enseignement primaire) du département du Nord et celui du Pas-de-Calais. L’originalité de ce cahier tient dans sa forme, une bande dessinée mettant en scène deux célèbres personnages : Boule et Bill. L’album montre comment Boule et Bill s’y prennent pour mener leur projet et le livret d’exercice guide, autant qu’il interroge, les élèves sur les points à maîtriser.
Ces cahiers ont participé à un apprentissage pour que soient ensuite par exemple créées une mini-entreprise d’objets décoratifs ou une classe entreprise fabriquant des jardinières à fleurs. Ils ont également aidé à préparer des visites d’entreprise. L’idée de départ était que, dans une cour d’école, trois enfants discutent des métiers de leurs parents. L’un d’entre eux dit que son père est boucher, l’autre dit que sa mère est institutrice. Mais le troisième reste incompris des deux autres lorsqu’il dit que ses parents sont entrepreneurs. Certes, on peut être boucher et entrepreneur, mais il s’agissait de constater que, dans une région déprimée où le dirigeant d’une grande entreprise restait le modèle entrepreneurial, il était nécessaire de casser, le plus tôt possible, ce type d’image pour rendre l’entrepreneuriat accessible et, surtout, ne pas imaginer qu’il est réservé à une élite.
La formation (ou la spécialisation) apporte une méthode et une expertise dans le montage d’un projet entrepreneurial pour les personnes désirant aller plus loin dans la maîtrise de l’entrepreneuriat. En France, un diplôme national a été créé à cet effet : le DEE, souvent appelé «D2E » lien. Ce Diplôme Etudiant Entrepreneur permet à des étudiants porteurs d’un projet de recevoir les fondamentaux du montage d’un projet et d’être suivi dans la maturation de celui-ci. Si le programme national en faveur de l’entrepreneuriat étudiant tel qu’initié en 2010 a indiscutablement été un formidable « booster », tout n’a pas démarré avec le statut EE et le DEE. Depuis longtemps, des programmes de formation (mais aussi de sensibilisation) à l’entrepreneuriat ont été montés par des enseignants passionnés et convaincus des apports d’une formation à l’entrepreneuriat, alors que leurs collègues regardaient cette dernière avec une certaine condescendance ou avec la certitude que l’entrepreneuriat ne s’enseigne pas … Ces précurseurs ont souvent agi avec une certaine discrétion car, proches des porteurs de projet, ils se consacraient sans doute beaucoup moins à la communication qu’à travailler l’efficacité de leur programme.
Ainsi, voici plus de trente ans que des programmes, très souvent innovants, ont vu le jour en école (d’ingénieurs ou de commerce) et à l’université. Tout candidat de formation initiale ou de formation continue trouvera de nombreuses licences professionnelles en entrepreneuriat et de nombreux masters (au sein des désormais mentions « EMP » : Entrepreneuriat et Management de Projets) dédié au montage de projets (création, reprise, …) ou aux métiers de l’entrepreneuriat (entrepreneur, conseiller, …). voici un exemple de Licence Professionnelle lien, un exemple de mention lien et deux exemples de parcours de Master lien et lien.
L’objectif prioritaire d’un accompagnement à l’entrepreneuriat devrait être d’éviter les échecs, et de faire gagner à la fois en maturité et en conviction les projets accompagnés. Le gain de maturité ne garantit pas le gain de conviction. Par exemple, un projet de valorisation d’une recherche par la création d’une entreprise peut, à un stade de maturation, ne pas avoir une équipe de porteurs effectivement constituée mais imaginée de façon convaincante. Plus tard, à un stade de maturité plus avancé, l’équipe peut avoir été constituée mais ne pas s’avérer convaincante. Nous reviendrons sur l’accompagnement entrepreneurial dans le chapitre consacré à l’écosystème (chapitre 12).
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Nous préférons parler « d’accompagnement à l’entrepreneuriat » que « d’accompagnement entrepreneurial », parce que ce n’est pas l’accompagnement qui est entrepreneurial, mais le projet accompagné. Les formes adjectivales du mot entrepreneuriat galvaudent parfois son sens.
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Pour aller plus loin :
Sénicourt, P., Verstraete, T. (2000). « Apprendre à entreprendre: typologie à quatre niveaux pour la diffusion d’une culture entrepreneuriale au sein du système éducatif français », Reflets et Perspectives de la Vie Economique, DeBoeck Université, tome XXXIX, n°4, p.1-10
Par définition, les primo-entrepreneurs n’ont pas d’expérience entrepreneuriale. Si, de plus, ils sont d’un jeune âge civil, l’entrepreneuriat peut leur sembler difficile d’accès. A défaut d’avoir été entrepreneur, le porteur d’un projet montrera qu’il a pu, à différentes occasions, être entreprenant (dans une association, lors d’un événement,…). Mais l’exemple suivant est intéressant pour montrer qu’une expérience entrepreneuriale manquante peut être comblée par le réseau de partenaires enrôlés dans le projet (cet exemple, tiré de Verstraete 2010, pourrait également tout-à-fait prendre place dans le chapitre 10 consacré aux parties prenantes). L’histoire remonte à une bonne vingtaine d’années. Jean et Georges sont deux étudiants inscrits en 2ème année d’un IUT, dans une spécialisation en Techniques de Commercialisation. Ils ont un projet de création d’entreprise et ont négocié, avec le responsable des stages, la possibilité de réaliser leur stage sur leur projet. Ce dernier consistait à créer une affaire dans le domaine du marketing direct, alors en plein essor. Pour combler leur manque d’expérience, voici ce qu’ils ont imaginé.
Dans un premier temps, ils ont habilement négocié une augmentation de leur argent de poche, augmentation nécessaire à la mise au point de leur projet sans pour autant arrêter les études. Ainsi, à la fréquence d’une fois par semaine (voire deux fois par semaine), ils ont pu inviter une partie prenante potentielle à déjeuner. Parfois, ils invitaient un concurrent. Ils procédaient par voie téléphonique et leur propos était à peu près le suivant: « Bonjour, nous sommes deux étudiants de deuxième année d’IUT TC et nous avons un projet de création d’entreprise à monter dans l’année. Nous avons décidé de travailler un projet dans le domaine du marketing direct. Au regard de votre expérience nous aimerions vous rencontrer pour discuter de ce projet, et comme nous savons votre temps très précieux nous vous proposons une invitation à déjeuner près de votre lieu de travail, un midi, le jour qui vous convient le mieux. Nous avons négocié un budget pour cela. Quand accepteriez-vous de nous rencontrer ? »
Outre une formulation qui a plu, les étudiants possèdent un capital sympathie, particulièrement Jean et Georges. Ils n’ont essuyé aucun refus. Qui plus est, les individus adorent parler de ce qu’ils savent. Lorsque les rendez-vous ont été réalisés dans une brasserie ou un petit resto, il ne fut pas rare que Jean et Georges se fassent finalement inviter. En une année, les étudiants ont appris énormément sur le secteur, les forces et les faiblesses des différents acteurs, les conventions, etc. Leur année universitaire terminée, le diplôme en poche, convaincus de l’intérêt à créer, ils ont décidé de se lancer. Très vite, ils ont appelé toutes les parties rencontrées qui, se sentant concernés par cette décision, sont devenues des relations privilégiées, comme en a témoigné le carnet de commandes rapidement rempli. Lors de la création d’une holding, bon nombre des premières parties prenantes, et quelques parties concurrentes, ont été sollicitées pour investir dans l’organisation. Elles ne l’ont pas regretté …
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… Une série de recherches opérent une distinction entre créateurs d’entreprises « novices » (c’est-à-dire en étant à leur première expérience) et « habituels» ces derniers étant décomposés en deux sous-catégories : « en série » s’ils créent à au moins deux reprises successives, mais après s’être débarrassés (volontairement ou non) de l’entreprise précédemment créée ; « en parallèle », s’ils créent une entreprise alors qu’ils ont encore le contrôle d’au moins une entreprise (on les appelle alors dans la terminologie anglo-saxonne « portfolio founders »). Sont-ils différents les uns des autres et ont-ils eu le même parcours professionnel ? Et surtout, les performances des entreprises ainsi créés vont-elles varier, avec en principe un préjugé favorable en faveur des créateurs «habituels » ? La question n’a pas qu’un intérêt académique, quand on sait l’importance accordée par les investisseurs, et notamment les sociétés de capital-risque, à l’expérience passée du (ou des) postulant à un soutien financier. Une étude de Paul Westhead et Mike Wright fournit des indications utiles à cet égard. Il existe bien des différences de profils, la plupart dans le sens escompté, entre d’une part les créateurs novices et les créateurs habituels; à celles-ci s’ajoute le fait que les créateurs habituels ne constituent pas une population homogène : par exemple, le poids respectif des motivations avancées à l’appui de la création diffère (les créateurs en parallèle invoquent davantage que les créateurs en série des considérations liées à l’appât du gain et à la sécurité de la famille). Mais ces variations ne se retrouvent pas au niveau des performances des entreprises crées, contrairement à l’intuition de départ. Le fait que les créateurs d’entreprises qui n’en sont pas à leur coup d’essai ne font pas davantage progresser leur affaire que leurs collègues moins expérimentés mérite réflexion, et doit inciter les investisseurs, au cours de leur diagnostic, à mobiliser un éventail plus complet de considérations que la seule expérience professionnelle des porteurs de projets.
Verstraete et Saporta, 2006, p114-115
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A vous de jouer :
1/ Relever, dans votre parcours, des moments où vous avez été entreprenant.
2/ Comment compenser un manque d’expérience non pas dans l’entrepreneuriat, mais par exemple dans le secteur d’activité visé par les affaires envisagées ?
Pour aller plus loin :
Verstraete, T., Saporta, B. (2006). Création d’entreprise et entrepreneuriat, Les Editions de l’ADREG lien
Verstraete, T. (2010). Préparer le lancement de son affaire – Méthode à l’usage de l’entrepreneur et de son conseiller, de Boeck
Westhead, P., Wright, M. (1998). « Novice, portfolio and serial founders : are they different ?», Journal of Business Venturing, 13(3), p.173-204
Il de s’agit pas, ici des compétences stratégiques (cf note 2.1), mais des compétences individuelles. Elles correspondent à la capacité d’un individu à mobiliser des savoirs, savoir-faire et savoir-être pour réaliser et maitriser une tâche plus ou moins longue, voire plus largement une activité (ensemble de tâches) ou encore plus largement un processus (ensemble d’activités). Appliquées au contexte de l’entrepreneuriat, les compétences sont définies comme cette capacité alors mise au service du projet entrepreneurial.
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« Emergeant d’abord dans le champ de la linguistique, la notion de compétence individuelle (CI) a connu depuis la fin des années 1980 un succès grandissant dans des disciplines aussi diverses que la psychologie, l’ergonomie, les sciences de l’éducation et de la formation, la sociologie du travail, sans oublier bien sûr l’intérêt accru que lui porte la GRH. En effet, ces dernières années, face à l’évolution des technologies de l’information et de la communication (TIC), la mondialisation de la concurrence et l’émergence de nouvelles configurations organisationnelles, la compétence individuelle est devenue l’un des termes clés de la GRH. Pour de nombreux auteurs, la notion de compétence est vue comme une nouvelle logique de GRH (Courpasson et al., 1991 ; Parlier, 1996), voire comme le « pivot de la gestion des ressources humaines » (Pichault et al., 2000, p. 128). Quant à Zarifian (1988), il voit dans la compétence, l’émergence d’un nouveau modèle d’organisation et de gestion de la main-d’œuvre. C’est ainsi que, dans les années 1990, la majorité des travaux s’est attachée à définir ce concept, qualifié à l’époque « d’attracteur étrange » (Le Boterf, 1994) et dont le succès tiendrait pour partie « à la polysémie du mot et à la difficulté d’en donner des définitions rigoureuses » (Laroche et al., 1998, p. 15). Pour notre part, et en nous appuyant sur les travaux des auteurs majeurs en gestion des compétences (Gilbert et al., 1992 ; Le Boterf, 1994; Defélix, 2003 ; Retour, 2005 ; Retour et al., 2009 ; Dietrich et al., 2010), nous comprenons la notion de CI comme étant la capacité d’un individu, à mobiliser et à combiner des ressources (connaissances, savoir-faire et comportements), en vue de mettre en œuvre une activité ou un processus d’action déterminé. Cette définition présente l’intérêt de décrire à la fois la nature et les conséquences de la compétence. D’une part, au niveau de la nature de la CI, c’est encore le triptyque, résonnant comme un slogan, du « savoir, savoir-faire, savoir-être », qui représente, dans la pratique, l’une des définitions de la CI la plus répandue (Courpasson et al., 1991 ; Durand, 2000). Même si ce triptyque fait l’objet de nombreux débats et critiques, son principal intérêt est son caractère didactique : il est simple, compréhensible et facile à retenir. D’autre part, au niveau des conséquences de la CI, les définitions proposées notamment par Meignant (1990), Gilbert et al. (1992) ou encore Le Boterf (1994), montrent que la CI est fortement contingente à une situation professionnelle donnée et correspond donc à un contexte.
Un individu n’est pas compétent en lui-même mais par rapport à quelque chose. En effet, des personnes qui possèdent des connaissances ou des capacités peuvent ne pas savoir les mobiliser de façon pertinente en situation de travail. Par conséquent, c’est la situation qui révèle les compétences réelles détenues par l’individu. C’est ainsi que la définition de la CI a été initialement pensée de manière très «contextualisée». »
Loufrani-Fedida, S., Saint-Germes, E., 2013, p.16-17
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Ces compétences s’apprécient par rapport à un référentiel pouvant prendre plusieurs formes.
L’une d’entre elles consiste à juger le résultat obtenu par l’individu. Peu importe la façon dont il a mobilisé les savoirs s’il atteint les objectifs fixés. Le problème tient alors dans ces objectifs qu’il faut définir lors d’une création d’entreprise ex-nihilo. L’exercice est peut-être encore plus complexe dans le cadre d’une innovation (de produit, de service, voire de BM). La réalité montre également que, chemin faisant, l’action révèle parfois les intentions (on pourra se référer au courant de la sociologie de l’action pour en comprendre les difficultés posées, par exemple, par le principe de réflexivité). Qui plus est, une fois l’affaire lancée, il n’est pas rare de devoir «pivoter », c’est-à-dire de changer de direction, de reformuler, de «redesigner », … Bref, de revoir le plan si tant est qu’il y en ait eu un … (nous verrons, dans une note de la composante Performances de la Rémunération de la valeur, comment utiliser le BM GRP comme un tableau de bord).
Une autre forme de référentiel est inscrite, cette fois, dans la façon de s’y prendre. Même si l’objectif n’est pas atteint, l’individu pourra être reconnu compétent parce que, par rapport au référentiel posé, il s’y est bien pris. Cette lecture s’inscrit alors dans un respect des conventions (tacites ou explicites) d’une communauté plus apte à pardonner l’échec (lequel s’exprime par la non atteinte des objectifs) lorsque les conventions ont été respectées. Or, l’entrepreneur déroge souvent aux conventions et c’est une des difficultés rencontrées par les accompagnateurs. En effet, ils inscitent les candidats à la création d’entreprise à faire preuve de méthode dans la mise au point de leur projet (sous réserve que la structure accompagnant ait mis en place les éléments permettant d’apprécier sa propre performance, donc au moins la pertinence de sa méthode). Ces candidats devront néanmoins souvent mobiliser leur créativité et faire preuve d’une certaine agilité car la complexité du contexte entrepreneurial éloigne toute possibilité d’absence d’ambiguïté.
Une troisième forme de référentiel est celui formellement posé, par exemple par la CNCP (Commission Nationale de la Certification Professionnelle). Bien connue des responsables de programmes de formation et des personnes travaillant dans la formation professionnelle, cette commission a notamment pour mission de répertorier l’offre de certifications professionnelles (Répertoire National de Certifications Professionnelles RNCP). Nés en 2002, à l’occasion de la mise en place de la validation des acquis de l’expérience (VAE), le RNCP et la CNCP ont, depuis cette date, contribué à l’évolution du champ de la formation professionnelle en mettant les compétences au centre de nombreux enjeux tels que : l’élévation de la qualification, le retour à l’emploi, la mobilité professionnelle, la sécurisation du parcours professionnel, la compétitivité.
Nous menons une recherche empirique depuis plusieurs années dont les compétences entrepreneuriales sont l’un des objets. Cette note sera amendée et substantiellement complétée dès que les résultats seront disponibles. On invitera à la lecture du numéro 33 de la revue Entreprendre et Innover, nommé « Graines d’entrepreneurs», pour entre autres constater que le réseau PEPITE travaille cette question des compétences entrepreneuriales (voir l’article de Brenet et al. 2017).
A vous de jouer :
1/ Dans quels contextes vous êtes-vous senti(e) compétent(e)?
2/ Possédez-vous les compétences pour entreprendre? Qui plus est dans le domaine envisagé ?
Pour aller plus loin :
Brenet, P., Schieb-Bienfait, N., Authier, J. (2017)., « Concevoir un référentiel de compétences pour les étudiants entrepreneurs : la démarche PEPITE », Entreprendre & Innover, 2(33),
p.29-43
Loufrani-Fedida, S., Saint-Germes, E., (2013). « Compétences individuelles et employabilité: essai de clarification de leur articulation »,
@GRH, 2(7), p.13-40
Lorsque, depuis la plus tendre enfance, un individu a côtoyé des entrepreneurs dans le cercle rapproché des relations familiales ou amicales, il n’est pas déraisonnable de penser qu’il a incorporé des schémas prédisposant à l’entrepreneuriat. Mais les éléments de socialisation entrepreneuriale sont plus larges, et plus complexes, que cette unique contingence. On (re)liera la section 4 de cet ouvrage relative aux contextes et milieux de la création d’entreprise (page 137 et suivantes), notamment le passage évoquant le travail de Philippe Pailot, rappelé ici en bibliographie.
Cette lecture académique rappelle à l’acteur entreprenant que le contexte comporte au moins trois cercles concentriques : le premier correspond à celui évoqué précédemment (notamment familial) pour considérer le passé du candidat à la création d’entreprise ; le deuxième est plus élargi et peut être un outil aux services du projet (système d’appui à la création d’entreprise, milieux professionnels, …) ; le troisième, plus global, renvoie aux valeurs de la société au sein de laquelle le phénomène de création s’exprime (ainsi Torrès, 2001, dresse quatre figures de l’entrepreneur sous-jacentes au type de culture associée à des espaces géographiques).
A vous de jouer :
1/ Les façons de penser l’entrepreneuriat sont-elles identiques partout dans le monde ?
2/ Dans quelle mesure la famille peut-elle inciter à l’entrepreneuriat ? (la même question peut être posée en évoquant l’entourage professionnel, la culture du pays, etc.)
3/ Illustrer avec des exemples concrets d’entrepreneurs.
Pour aller plus loin :
Pailot, P. (2002). « Méthode biographique et entrepreneuriat : application à l’étude de la socialisation entrepreneuriale », Revue de l’Entrepreneuriat, 2(1)
Torrès, O. (2001). « Les divers types d’entrepreneuriat dans le monde », Management International
Verstraete, T., Saporta, B. (2006). Création d’entreprise et entrepreneuriat, Editions de l’Adreg lien
Le titre de cette note reprend évidemment une célèbre maxime de François-Marie Arouet, dit Voltaire, qui disait : « j’ai décidé d’être heureux, c’est bon pour la santé ». Olivier Torrès, Professeur à l’Université de Montpellier et initiateur de l’observatoire Amarok, nous explique qu’entreprendre est salutogène (a contrario de pathogène), mais attention aux excès …
A vous de jouer :
1/ Visiter le site de l’observatoire Amarok lien
Pour aller plus loin :
Torrès, O. (2017), La santé du dirigeant – de la souffrance patronale à l’entrepreneuriat salutaire, de Boeck, 2ème édition
Nous menons une recherche empirique depuis plusieurs années dont les compétences entrepreneuriales sont l’un des objets. Cette note sera écrite dès la publication des résultats.
Par l’exercice de leadership, l’entrepreneur doit motiver ses salariés, voire plus largement toutes les parties prenantes à l’entreprise. La question est alors posée de savoir qui le motive, lui ? Il s’agit moins de cerner les facteurs de motivation comme causes ou fruits d’une réalisation (le gain, la passion, etc. vu dans une précédente note), c’est-à-dire ce qui le motive à entreprendre, que d’interroger la participation d’autres éléments à la motivation de l’entrepreneur. Un entourage familial attentif et distrayant, des collaborateurs impliqués, des clients satisfaits, etc. participent à motiver le dirigeant. Ce dernier veillera à prendre du plaisir ailleurs que dans le travail, à avoir un loisir constituant une forme d’exutoire lorsque le travail étouffe, à pratiquer un sport, … autant de piste à considérer pour préserver le caractère salutogène de l’entrepreneuriat et ne pas verser dans le burn-out 4.11.
Pascale Faber (2000), alors consultante (elle consacre désormais la moitié de son activité à l’enseignement), a procédé à un exercice doctoral particulièrement intéressant. Elle s’est intéressée à la motivation des dirigeants de PME (certes, il ne faut pas assimiler entrepreneur et dirigeant de PME, car ce dernier n’est pas toujours entreprenant, mais cette réserve étant formulée, le propos sera compris). En prenant l’adage disant qu’on est jamais aussi bien servi que par soi-même, ce travail peut être vu comme une incitation à l’introspection, en ce sens que les enseignements pouvant y être tirés par un dirigeant sont que sa motivation passe d’abord par un chemin personnel consistant à savoir se motiver. « Pour se motiver, il n’existe pas de mode d’emploi, mais une forte sensibilisation à la connaissance de soi … se motiver demeure un enjeu important pour le dirigeant de PME car il est le principal responsable de l’équilibre de toute sa structure. » (Faber, 2000, p.7).
Pascale Faber interprète la motivation du dirigeant en s’appuyant, entre autres, sur le travail de Ruth Kanfer (1990).
Celle-ci offre une perspective renouvelée de la motivation en l’interprétant comme liée à des dépendances internes (besoins, désirs, pulsions, …) et externes (stimulations du milieu), à des mécanismes cognitifs conduisant l’individu à, de façon indépendante cette fois, conférer des valeurs à son propre comportement et à une capacité à « s’auto-réguler » face aux possibles de la situation (le sujet est alors actif et non contraint). Ce troisième lien met l’accent sur l’énergie générée par la motivation. « Cette posture scientifique nous a permis de définir la motivation comme une force énergétique reliant des facteurs individuels issus de la personne même du dirigeant (son histoire de vie, son identité, ses valeurs, sa personnalité, ses affects…) et des facteurs contextuels liés aux caractéristiques de la PME (sa genèse, son domaine d’activité, le nombre des salariés, la constitution du capital, la stratégie mise en place…) » (p.437). Le travail de l’auteure montre qu’autrui peut, tout au plus, influencer le dirigeant, mais que cette force énergisante doit être lue comme un processus dont les ressorts appartiennent au dirigeant lui-même. Autrement dit: « la motivation du dirigeant de PME passe avant tout par un chemin personnel qui consiste à savoir se motiver » (p.438).
Depuis plus de 10 ans nous appelons Pascale Faber pour animer un séminaire auprès de nos porteurs de projet. Cette précieuse intervention est particulièrement appréciée, avec toutefois de rares récalcitrants à une approche introspective ainsi alertés sur les chemins s’offrant à eux à un moment charnière : créer ou ne pas créer. Il faudra remarquer que généralement les récalcitrants ne passent pas à l’acte …
Elles ne sont pas fréquentes mais elles ne sont pas surprenantes lorsqu’un partenaire vise à être rassuré par exemple sur le soutien apporté par le conjoint. Tout le reste est une question d’éthique et renvoie à l’asymétrie d’information. Il s’agira alors, pour toutes les parties, de faire preuve d’éthique en révélant les éléments à connaître pour l’avenir du projet. Alors que l’heure où le « pitch» devient anormalement concis et, conséquemment, gomme l’épaisseur de la mise en œuvre d’un projet, où les porteurs se transforment en sirènes qu’ils ne doivent pourtant pas devenir, il devient difficile d’attendre que chacun entre dans une confession … Ceci dit, l’appel de fonds n’est pas une prière.
La notion d’équipe entrepreneuriale a tardé à devenir un objet d’étude en France, alors qu’en d’autres endroits les questions étaient déjà posées à propos de sa délimitation, de son processus de formation, de ses modes de fonctionnement et de son influence sur la performance (Verstraete et Saporta, 2006). Ce constat nous avait conduit à initier un numéro spécial de la Revue de l’Entrepreneuriat en 2006 (Boncler et al., 2006), entre autres pour distinguer l’équipe entrepreneuriale de l’équipe dirigeante ou de l’entrepreneuriat collectif.
Un certain nombre de critères sont régulièrement évoqués pour tenter une définition de l’équipe entrepreneuriale (voir par exemple Condor et Chabaud, 2012). Mais force est de constater l’absence de consensus et des nuances persistent. Ainsi, selon Kamm et Nurik (1993), l’équipe entrepreneuriale n’est constituée que des membres fondateurs, déjà engagés avant le démarrage des activités commerciales d’une entreprise et partageant la propriété de celle-ci ; selon Kamm et al. (1990), ils seraient même équitablement intéressés. Ces positions sont contestées (ex : Cooney, 2005).
Selon nous, l’équipe entrepreneuriale réfère aux individus réunis pour entreprendre ensemble. En fait, pour comprendre ce qu’est une équipe entrepreneuriale, sans doute faut-il adopter un modèle de l’entrepreneuriat pour la conceptualiser. Le phénomène entrepreneurial concerne une relation symbiotique entre un individu (ou plusieurs dans le cas d’une équipe) et l’organisation impulsée (acte initial d’émergence et ses éventuelles suites) par lui (ou par eux). Nous renvoyons à de précédents développements que nous ne reprendrons pas ici (cf. Verstraete, 1997, 2001, 2003), sauf à rappeler que la polysémie du terme organisation renvoie à diverses formes d’entrepreneuriat. Ainsi, l’entrepreneuriat ne se réduisant pas à la création d’entreprise, une équipe entrepreneuriale peut se réunir pour différents types de projets (création, reprise, intrapreneuriat, …), lesquels génèrent une convention non forcément juridiquement reconnue (ex : l’économie informelle dans certains pays) mais généralement ainsi institutionnalisée (entreprise, association, filiale, voire département dans une organisation existante, etc.).
Ainsi, pour qualifier un individu comme membre d’une équipe entrepreneuriale, il convient d’observer empiriquement dans quelle mesure il est effectivement en symbiose avec l’organisation impulsée, qu’il ait été à l’origine du projet (membre fondateur), ou qu’il ait rejoint le fondateur ou l’équipe entrepreneuriale déjà constituée, qu’il soit propriétaire de tout ou partie de l’organisation ou qu’il ne le soit pas (à ce titre, certaines formes juridiques n’appellent pas la constitution d’un capital et ne posent pas la question de la propriété, par exemple une association loi 1901 ; la responsabilité y reste évidemment présente car le dirigeant peut être personnellement responsable). Cette conception admet l’idée d’une équipe entrepreneuriale évolutive (Chandler et al. 2005 ; Forbes et al. 2006), notamment lorsque de nouvelles compétences permettent d’aborder une nouvelle phase de développement, ou lors d’une croissance comme le relèvent Gartner et al. (1992).
Nous avons vu dans ce manuel que les partenaires, notamment financiers, s’interrogent sur le profil du porteur d’un projet, donc, le cas échéant et c’est évidemment fréquent, sur le profil de chaque membre de l’équipe. Nous avons incité ces derniers à mener un exercice d’introspection (cf. note 4.5), mais ils veilleront également à cerner le profil, autant que les motivations, de leurs associés. Ainsi nous avons pu voir un créateur, ayant eu l’idée, s’associer à un membre de sa belle-famille dont les motivations se sont révélées incompatibles avec les siennes. Celui-ci voulait créer une entreprise pérenne gérée en bon père de famille de sorte à atteindre une retraite qui n’était pas lointaine (création suite à un licenciement à l’âge de 55 ans), alors que le second avait précocement flairé l’excellente possibilité de revente avec une plus-value intéressante. Chemin faisant, il a pris le leadership conduisant à ses fins.
Si les équipes se constituent souvent par une combinaison d’affinités et de compétences (Ben Hafaïedh, 2006), l’introspection doit concerner autant chaque individu de l’équipe que le collectif. Ce travail sera mené en équipe et, bien souvent, un coach est alors d’une grande utilité. Pour certains projets, par exemple de valorisation de la recherche par une création d’entreprise, l’équipe de porteurs du projet doit être constituée. Les personnels impliqués de la cellule de valorisation ou de la SATT (société d’accélération du transfert de technologie) jouent alors un rôle clé et gagnent à mobiliser le concept de BM sans omettre de distinguer deux composantes du BM : le(s) porteur(s) et les parties prenantes. En effet, un individu peut faire partie des membres de l’équipe dirigeante sans présenter l’attitude entrepreneuriale afférente. II est alors, selon notre conception (cf. symbiose) une partie prenante. Cette distinction n’est pas neutre selon l’ambition du projet. Nous y reviendrons dans une prochaine note de ce manuel.
A vous de jouer :
1/ Repérer des incompatibilités, puis tenter de les rendre compatibles.
2/ Identifier un coach pouvant aider à l’introspection collective.
3/ Identifier des équipes entrepreneuriales célèbres et en apprécier la complémentarité. Ont-elles « tenu » ?
Pour aller plus loin :
Ben-Hafaïedh, C. (2006). «Entrepreneuriat en équipe : positionnement dans le champ de l’entrepreneuriat collectif », Revue de l’Entrepreneuriat, 5(2), p.31-54
Boncler, J., Hlady-Rispal, M., Verstraete, T. (2006). «Entreprendre ensemble : cadrage théorique des notions d’entrepreneuriat collectif, d’équipe dirigeante et d’équipe entrepreneuriale », Revue de l’Entrepreneuriat, 5(2), p.9-29 lien
Condor, R., Chabaud, D. (2012). « La formation de l’équipe entrepreneuriale autour du projet de création d’entreprise: constats et enjeux », Revue de l’Entrepreneuriat, 11(2), p.31-52
Chandler, G. N., Honig, B., Wicklund, J. (2005). « Antecedents, moderators, and performance consequences of membership change in new venture teams », Journal of Business Venturing, 20(5), p.705-725.
Forbes, D.P., Borchert, P. S., Zellmer-Bruhn, M. E., Sapienza, H. J. (2006). « Entrepreneurial team formation: an exploration of new member addition », Entrepreneurship Theory and Practice, 30(2), p.225-248.
Gartner, W., Bird, B., Starr J. (1992). « Acting as if: Differentiating Entrepreneurial from Organisational Behaviour», Entrepreneurship, Theory and Practice, 16(3), p.13-31.
Verstraete, T., Saporta, B. (2006). Création d’entreprise et entrepreneuriat, Les Editions de l’ADREG lien
Des interviews sont programmés, en lien avec les propos de ce chapitre, et prendront place sur cette page au fur et à mesure de leur réalisation.